
Cheviré
Il est sans doute très peu de lieux « nantais » dont la perception se soit aussi profondément transformée en aussi peu de temps, de l’absence totale de notoriété à la centrale électrique dont il ne reste rien aujourd’hui, puis au pont, inauguré en 1991, sans oublier le plus discret port à bois dont les fonctions ont elles aussi évolué…
La centrale
Installée dans une ancienne île de la Loire, en aval de Nantes, la centrale commence à produire à la Noël 1953 dans le contexte d’une France qui entame la spectaculaire croissance des Trente Glorieuses. Cheviré remplace 14 des 16 anciennes et parfois minuscules centrales du quart nord-ouest de la France (seules demeurent Chantenay et Brest), à une échelle alors énorme : sa production totale – les travaux ne sont achevés qu’en 1958 – correspond aux besoins de l’ensemble de l’Ouest tels qu’ils sont prévus pour 1959. Elle est en outre techniquement pionnière, avec des matériels très divers, si bien qu’elle est une sorte de « centrale d’essais », servie par des personnels souvent fiers d’y être affectés, qui choisissent d’autant plus volontiers d’y rester que la plupart sont originaires du département. La masse énorme qu’elle représente dans le paysage de la vallée contribue, aussi, à la notoriété d’une usine de plus de 400 salariés à son apogée, à la vie syndicale très active.
Entre l’époque de la production à tout prix, après la Libération, et celle du nucléaire, Cheviré est à l’échelle française la pionnière de l’époque de la recherche de rentabilité dans l’utilisation d’énergies alors bon marché, le fioul principalement. Ce qui la condamne : le processus de fermeture est amorcé dès 1976 et s’achève en 1986, l’année même où est prise la décision de construire le pont de Cheviré.
Le pont
Le projet de franchissement de la Loire, évoqué dès 1948, tourne à la controverse politique, élus socialistes et communistes penchant pour le tunnel que Michel Chauty, maire en 1983, refuse au profit d’un pont. Les deux projets témoignent du souci de maintenir l’accès des navires dans le port de Nantes. Le pont est inauguré le 27 avril 1991. Sur la rive nord les fondations s’ancrent dans une roche dure superficielle mais sur la rive sud, il faut battre des pieux en béton de 38 mètres de profondeur. Haut de 52 mètres, long de 1 562, large de 36, il est constitué de deux viaducs latéraux en béton et d’une travée centrale métallique de 160 mètres.
Intégré au périphérique et à la route des estuaires, Cheviré décharge la ligne de ponts historique de sa fonction de traversée du fleuve. En 2012, 90 000 véhicules le franchissent quotidiennement mais la réduction, pour des raisons de sécurité, du nombre de voies à la descente entraîne de forts ralentissements. La sensibilité de l’ouvrage aux tempêtes conduit parfois à sa fermeture, synonyme de bouchons sur le périphérique et dans le centre de Nantes.
Le port
En aval du pont, l’ancienne estacade de Cheviré a été réaménagée pour accueillir le port à bois, les dernières activités portuaires (ferrailles) du quai Wilson et le trafic sablier. Un ponton permet également l’embarquement d’éléments d’Airbus vers Saint-Nazaire.
Ces activités sont menacées par le glissement du port vers l’aval, mais la proximité du périphérique et de l’aéroport en font un site logistique de premier ordre, dans l’un des derniers grands espaces disponibles en limite de la ville : le territoire du rêve de formes urbaines novatrices.
Jean-Pierre Branchereau, Alain Croix
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
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Nantes, la métamorphose d'une ville - Auran/Ina : Le port autonome
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Jean-Pierre Branchereau, Alain Croix
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