Bandeau
Projets de salles de spectacles nantaises jamais construites (1755-1765) Nantes la bien chantée : Le petit mercelot

166

Ancienne motte Saint-Pierre


À l’emplacement de l’actuel cours Saint-Pierre se trouvait une motte du même nom. Bordant l’enceinte antique et plus tard la fortification médiévale, ce lieu semble avoir été une vaste nécropole de l’époque mérovingienne avant de se peupler d’habitations bordant des voies désormais disparues.

Nivelé et aménagé en promenade publique au 18e siècle, la motte Saint-Pierre fera place au cours du même nom lors de l’aménagement du cours des États.

Un lieu bordé de voies antiques

Depuis l’est, l’accès à la cité antique (Portus namnetum) se fait par plusieurs voies romaines dont une partie des tracés a aujourd’hui disparu. Ainsi, au nord de l’actuel cours Saint-Pierre, l’actuelle rue Maréchal-Joffre, grande voie antique venant de la cité Juliomagus (Angers), aboutit à la ville fortifiée et se termine à une porte construite à l’emplacement de l’actuelle porte Saint-Pierre. Une autre voie, venant également de l’est, plus au sud, traversait l’actuel quartier Richebourg et se dirigeait vers une porte aujourd’hui disparue (la porte Charrière) pour ensuite emprunter l’actuelle impasse Saint-Laurent. En 1930, les travaux du tunnel Saint-Félix permirent de mettre à jour les vestiges d’une chaussée romaine à l’emplacement de l’actuelle place de la Duchesse-Anne ; cette voie empruntait-elle ce tracé vers la porte Charrière ?

Fouille de l’Évêché de Nantes

Fouille de l’Évêché de Nantes

Date du document : 1912

Une nécropole mérovingienne

Un ancien espace funéraire est mis au jour en 1911 lors de fouilles archéologiques menées par le chanoine Georges Durville aux abords de la porte Saint-Pierre. Une dizaine de sarcophages est étudiée. L’emprise de la nécropole se serait étendu sur 5 hectares à l’est de la porte Saint-Pierre, à l’emplacement des actuels cours Saint-Pierre et Saint-André. Un des sarcophages, de type nivernais (caractérisé par un décor de croix multiples et par la forme du couvercle), permet de dater les premières inhumations à la fin du 6e siècle ; l’utilisation de ce vaste cimetière aurait duré jusqu’au début du 8e siècle, comme l’ont indiquées les datations radiocarbones effectuées sur les corps inhumés.

Fouille de la Porte Saint-Pierre

Fouille de la Porte Saint-Pierre

Date du document : 2012

Une motte périurbaine

Les mottes périurbaines sont des éminences de terre ou de roche situées à l'extérieur des remparts d'une ville. La motte Saint-Pierre est une des trois mottes situées sur le front est des fortifications de Nantes. La motte de Château-Gaillard, située vers Richebourg, est nivelée en 1423 pour la sécurité de la ville, son édification est donc antérieure au 15e siècle. Mais qu’en est-il des deux autres mottes dites de Saint-André et de Saint-Pierre à l’emplacement des actuels cours éponymes ? De nombreuses hypothèses sont avancées et leur aménagement comme moyen défensif pourrait dater du 11e siècle, antérieurement « au perfectionnement et à l’utilisation plus fréquente de l’artillerie mécanique aux 12e et 13e siècles ». Il pourrait également s’agir de collines naturelles « parfois augmentées par les déblais issus du creusement de fossés ». Cependant, les archives du Chapitre précise qu’au 15e siècle il n’a jamais été fait mention d’une motte.

Un lieu habité au Moyen Âge

Le faubourg Saint-Clément s’étendait autrefois plus à l’ouest qu’aujourd’hui, jusqu’à l’actuelle place Foch située entre les deux actuels cours. En 1226, sous la régence du baillistre de Bretagne Pierre de Dreux, les églises de Saint-Cyr (vers le nord du cours Saint-André) et Saint-Clément sont démolies, ainsi que des maisons, pour ouvrir des « fossés nouveaux à travers les cimetières et ouvrir de nouvelles murailles sur les fonds de l’église ». Ces modifications concernant l’accroissement de l’enceinte vers l’est prouve la présence d’habitations antérieures au 13e siècle bordant le nord de l’actuel cours Saint-Pierre.

Des aveux rendus au Chapitre à la fin du 15e siècle et au début du 16e siècle, et le témoignage d’un habitant de Richebourg, prouvent qu’il y avait « entre la porte de Saint-Pierre et le faubourg de Richebourg un chemin conduisant audit faubourg » ainsi qu’une « rue et venelle de l’Épicière » où y sont adjacents des maisons courtes et jardins relevant du fief et juridiction du Chapitre. En ce temps, « il n’est fait mention qu’il n’y est aucune motte ». De plus, un autre document stipule qu’il y avait « plusieurs et grand nombre de maisons entre la dite aumônerie de Saint-Clément et la dite rivière de Loire [...] sur le chemin à aller de la dite porte Saint-Pierre à la dite rivière que sont les maisons des auditoire et boucherie, quelles maisons furent abattues au temps du dit siège (1487) ». Les nombreuses maisons abattues à l’emplacement de la motte Saint-Pierre n’auraient donc jamais été réédifiées et le terrain serait donc resté vague aux abords des fortifications.

Extrait plan cavalier centré sur la motte Saint-Pierre

Extrait plan cavalier centré sur la motte Saint-Pierre

Date du document :

En 1552, les chanoines du Chapitre obtiennent des lettres patentes du roi de France Henri II pour l’établissement de quatre foires en la paroisse de Saint-Clément, sur les mottes, aux jours des fêtes de la Saint-Marc, Saint-Clair, Saint-Clément et Saint-André, et un marché tous les lundis de l’année. Les marchands de bestiaux occupent la motte Saint-André tandis que sur la motte Saint-Pierre et devant le collège Saint-Clément s’y installent potiers et merciers.

L’aplanissement de la motte et aménagement du cours des États

Une délibération du 28 août 1598 évoque le projet d’aplanir les mottes dans le cadre d’un projet d’embellissement, mais l’exécution est différée. Les travaux de terrassements débutent en 1713 et la future promenade est sablée et plantée d’ormes ; l’aménagement de la partie est du cours Saint-Pierre entraîne un procès entre les frères Minimes, les chanoines du Chapitre et la Ville, « chacune des parties prétendant à un droit privilégié et exclusif ».

Plan centré sur la Motte Saint-Pierre

Plan centré sur la Motte Saint-Pierre

Date du document : 1757

Sous la direction de l’architecte de la ville Jean-Baptiste Ceineray, le cours des États prend la forme de la promenade que nous connaissons aujourd’hui, bien qu’un projet d’embellissement présenté en 1760 par Rousseau au duc d’Aiguillon proposait l’aménagement des actuels cours en forme semi-circulaire pour donner une forme de cœur à la ville de Nantes.

Plan de la Ville de Nantes et du projet d’embellissement présenté par M. Rousseau

Plan de la Ville de Nantes et du projet d’embellissement présenté par M. Rousseau

Date du document : 1760

Si une majeure partie des fortifications est démolie dans le courant du 18e siècle, il subsiste encore aujourd’hui les ruines de la tour du Mûrier, une des dernières témoins du Nantes médiéval au temps des mottes périurbaines.

Kevin Morice
Archives de Nantes
2024

Aucune proposition d'enrichissement pour l'article n'a été validée pour l'instant.

En savoir plus

Bibliographie

Dreillard Camille, « Les fortifications médiévales et modernes de la ville de Nantes : un état des connaissances historiques, archéologiques et topographiques », Revue archéologique de l'Ouest [En ligne], n°34, 2017, p. 323-352, [Consulté le 30 septembre 2024], article en ligne disponible ici

Durville Georges, « Les fouilles de l’évêché de Nantes en 1910-1911 », Bulletin de la Société archéologique de Nantes et du département de la Loire-inférieure, 1912

Henrion Fabrice, « Le sarcophage de pierre du haut Moyen Âge, des critères pour une étude », Les Cahiers de l’École du Louvre [En ligne], n°17, 2021, [Consulté le 30 septembre 2024], article en ligne disponible ici

Lacoste Nicolas, Porte Saint-Pierre, rapport de fouille archéologique, Nantes, Direction du patrimoine et de l'archéologie de la Ville de Nantes/Nantes Métropole, 2014

Lelièvre Pierre, Nantes au XVIIIe siècle : urbanisme et architecture, Picard, Paris, 1988, 295 pages

Travers Nicolas, Histoire civile, politique et religieuse de la ville et du comté de Nantes, Volume 1, 1836

Pages liées

Fortifications

Jean-Baptiste Ceineray

Motte du Château-Gaillard et jardin au duc

Foires

Ressources Archives départementales de Loire-Atlantique

G 211 : Titres de propriété du chapitre de la cathédrale de Nantes – Domaines de la ville de Nantes

Tags

Centre Ville Extension et limite urbaine Fortification Archéologie

Contributeurs

Rédaction d'article :

Kevin Morice

Vous aimerez aussi

De 260 travaillant 10 heures par jour en 1883, le nombre d’ouvriers des Anciens Chantiers Dubigeon passe à 650 en 1902. Les aléas climatiques et le risque que représente certaines tâches...

Contributeur(s) :Gaëlle Caudal

Date de publication : 09/11/2021

1764

Ancien domaine des Renardières

Architecture et urbanisme

Dans le premier tiers du 19e siècle, le domaine des Renardières est la propriété de Pierre Ogereau, directeur d’une usine de corroierie prospère. Ce dernier est le commanditaire de...

Contributeur(s) :Nathalie Barré , Michel , Lucie ...

Date de publication : 29/11/2021

1647

Résistants

Événement historique

Hormis le Mémorial des Cinquante otages, aucun monument commémoratif nantais ne porte de liste nominative des résistants morts pour leur engagement. Cette absence tient aux luttes mémorielles...

Contributeur(s) :Didier Guyvarc’h

Date de publication : 21/10/2019

2549