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René Guy Cadou (1920-1951) Rue Dos d'Âne

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Presbytère de Doulon


Les origines exactes du presbytère de Doulon sont méconnues. Les archives ne permettent pas de savoir si l’un des bâtiments du monastère, implanté sur le terrain au Moyen Âge, a servi à accueillir le presbytère.

Des origines encore discutées

C’est au début du 9e siècle qu’un monastère est fondé à Doulon. Ce petit ensemble monastique – qui ne semble pas avoir peser sur le territoire – passe entre les mains de plusieurs possesseurs laïcs et ecclésiastiques jusqu’au début du 12e siècle. Il est vraisemblable qu’à cette époque l’établissement tombe en déshérence et disparaît à la faveur de la création d’une paroisse.

On ignore quels étaient les bâtiments conventuels et si l’un d’entre eux a été réutilisé par la paroisse comme presbytère ou si un nouvel édifice a été construit : jusqu’à la seconde moitié du 18e siècle, les archives ne mentionnent pas l’existence d’un ensemble presbytéral.

Pour autant, les caractéristiques stylistiques du bâtiment laissent penser qu’il fut érigé durant le 17e siècle ou au tout début du 18e siècle.

Le presbytère à la veille de la Révolution

Aujourd’hui isolé, le presbytère de Doulon était alors érigé au cœur d’un petit ensemble composé d’un jardin entouré de murs, d’un verger et d’un pré entouré par des haies. La cour était grevée d’une servitude en faveur du seigneur de Chamballan qui pouvait au moyen de portes percées dans les murs du jardin rejoindre son banc à l’église depuis sa demeure sans passer par le chemin communal. La porte entre la cure et l’église était appelée la « porte seigneuriale » ou « porte du seigneur ». Le même seigneur et ses serviteurs avaient également le droit de traverser le verger du presbytère pour rejoindre plus facilement le chemin.

En 1795, l’accès au presbytère se fait par « une petite avenue », un chemin bas bordé d’arbres qui mène au portail : l’entrée actuelle est un vestige de cet agencement. L’ensemble se compose d’une maison précédée d’une grande cour close de murs mitoyens avec ceux de l’église et du cimetière, d’un jardin, d’un verger et d’un pré à l’arrière de la maison.

La maison consiste en un rez-de-chaussée traversé par « un seul vestibule qui conduit de la cour au jardin et dans lequel se trouve un escalier en bois ».

À droite du vestibule, se trouve une petite chambre carrelée avec cheminée, tandis qu’à gauche « un corridor » dessert « un salon avec cheminée » et, » au bout du corridor, une autre petite chambre carrelée ». Une cuisine en enfilade de cette pièce termine la distribution du rez-de-chaussée. « Au premier étage, au-dessus de la pièce de droite du vestibule », se trouve « une pièce pareille et correspondante » ; au-dessus du salon et de la petite chambre, une grande pièce carrelée avec cheminée et un cabinet. Le comble est divisé en deux greniers. Un troisième grenier est également aménagé au-dessus de la cuisine. L’ensemble de la bâtisse est alors carrelé de petits carreaux de terre cuite.

Enfin, « un petit cellier couvert en tuiles avec un four dans l’intérieur » est adossé sur le pignon droit de l’édifice.

Devant ce logis, la cour est occupée par de nombreux bâtiments utilitaires construits en lattis. À l’entrée de la cour, le long du mur de droite, il y a une étable à vaches et un poulailler couverts de tuiles tandis que sur le mur de gauche se trouve un pressoir et un petit chai ; une petite grange est érigée dans la continuité. Le puits est au nord du presbytère ; l’écurie et la boulangerie à l’ouest. Les latrines sont dans le jardin ainsi que l’accès aux caves. Autour du jardin, les murs sont couverts d’arbres en espalier.

Une structure « en impériale » – peut-être un pigeonnier – marque  l’entrée de la cure.

Un chantier de réhabilitation coûteux pour la petite commune de Doulon

Cet ensemble est vendu comme bien national le 19 thermidor an IV. Il est alors acheté par un groupe de paroissiens : Mathieu Dupré, François Fleury, François Lisé, Marc Mianguet, Julien Fleury, Julien Peignon, Philippe hardy, Mathurin Pitard, Pierre Millet, Julien Bel effet, Pierre Pitard, Pierre Quirion.

Quelques années plus tard, la commune rachète le presbytère à ses nouveaux possesseurs afin de pouvoir loger le nouveau curé. Les habitants demandaient à la commune un montant équivalant au prix d’achat initial. Le 18 juillet 1817, les paroissiens rétrocèdent l’ensemble presbytéral à la Ville de Doulon pour 2969 francs. La commune vend 3 hectares, 89 ares et 17 centiares pour solder le prix d’acquisition et le prix des réparations de l’église et du presbytère.

En 1874, le presbytère est dans un état déplorable, et la Ville mandate l’architecte nantais Henri Gilée pour dresser un devis. Celui-ci prévient la commune qu’il faudrait au minimum débourser 7000 francs pour les réparations urgentes mais que le bâtiment ne serait pas remis réellement en état à moins de 25000 francs. Quatre ans plus tard, le 11 août 1878 le conseil municipal vote la réfection de la toiture et des murs du presbytère et engage l’entrepreneur doulonnais Thériton pour un contrat de cinq ans. Celui-ci doit réaliser chaque année une tranche de travaux ne pouvant excéder le prix de 2500 francs.

C’est peut-être à cette époque que la cuisine et la petite chambre au bout du corridor décrites à la fin du 18e siècle sont abattues et reconstruites, que la bâtisse est recouverte d’un enduit épais ne laissant plus voir ses caractéristiques architecturales et que la cheminée en marbre du rez-de-chaussée ainsi que son décor remplacent l’ancien aménagement.

Un terrain fortement reconfiguré

Au 20e siècle, des baux réguliers sont établis entre la commune et les curés successifs. En 1934, le bail de M. Chevaulon précise que la propriété comprend au rez-de-chaussée une cuisine, une salle à manger, un salon et un couloir le long de la cour ; à l’étage sur le palier un couloir, une antichambre, une pièce de bureau, un cabinet de toilette, une grande chambre avec placard ; au 2e étage, une mansarde et un grand grenier. Dans la cour, une écurie-étable, une grange, un cellier, une buanderie, un poulailler, un débarras ; au fond de la cour, un corps de bâtiment avec appentis, une grande cuisine et arrière-cuisine, une chambre de bonne ; un grand jardin avec une serre. Cette description démontre que la propriété est alors quasiment identique à son époque de création.

En 1966, la toiture qui venait d’être refaite est abîmée par la tempête qui emporte également le clocher de l’église. À la même époque, le curé se plaint du caractère moyenâgeux du presbytère. Il améliore les choses en créant une salle de douche sur un palier de l’escalier et aménage une nouvelle chambre dans le grenier. L’élan de modernisation pousse également l’équipe paroissiale à faire table rase des bâtiments extérieurs pour les remplacer, sans autorisation, par des salles paroissiales adossées sur le mur nord de la propriété.

En 1985, la reconstruction de l’église ampute le presbytère des trois-quart de son jardin : l’intérêt archéologique du sous-sol de l’ancienne église interdit de reconstruire l’édifice sur le même emplacement. Les anciens communs (ancienne cuisine et chambre de bonne) sont détruits et le jardin du presbytère sert d’assise à la nouvelle construction. Cette décision reconfigure complètement un îlot qui existait vraisemblablement depuis le Moyen Âge.

Un lieu à réinventer

En 2002, le diocèse décide de réunir quatre paroisses (saint-Médard, Saint-Jean-Baptiste, Notre-Dame-de-Toutes-Aides, et Saint-Marc) en une seule. Le presbytère est abandonné en 2003 au profit de la maison paroissiale située rue de la Ville-en-Pierre. Sans affectation, l’édifice s’endort.

En 2014, il est investi par soixante-dix demandeurs d’asile. Au bout de deux ans sans solution, le lieu « dont les conditions d’hygiène et de sécurité étaient devenues insoutenables » est évacué le 22 novembre 2016. L’édifice est alors barricadé pour éviter les nouvelles intrusions.

En 2021, pour redonner une affectation à ce bâtiment, l’un des plus anciens de l’agglomération nantaise, le presbytère de Doulon fait l’objet d‘un appel à projet dans le cadre des « 10 lieux à réinventer ».

Aujourd’hui, le presbytère est accessible par un portail en pierre composé d’une porte cochère et d’une porte piétonne. Il s’élève au fond d’une cour séparée du jardin de l’église par un grillage et une haie.

De plan rectangulaire, le presbytère est un bâtiment massif de trois niveaux d’élévation : rez-de-chaussée, étage et grenier. Ses façades sont recouvertes d’un enduit épais qui masque les détails de son architecture.

Sur le côté du presbytère, le puits originel a été conservé avec sa margelle de pierre usée par le temps et l’utilisation.

Julie Aycard
Direction du patrimoine et de l'archéologie, Ville de Nantes / Nantes Métropole ; Service du Patrimoine, Inventaire général, Région Pays de la Loire
2021

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