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Pirmil


Sur la rive sud de la Loire, trois lieux-dits commandent l’entrée dans Nantes et les routes commerciales : Pirmil et Dodane (ou Dos d’âne) qui bien que situés à deux kilomètres du centre-ville font partie des faubourgs de Nantes, et Pont-Rousseau à l’ouest de la Sèvre, un faubourg qui dépend du bourg de Rezé.

Un même nom pour trois entités

Même si par extrapolation le nom de Pirmil a supplanté tous ceux des hameaux bâtis au débouché de la ligne des ponts, les plans et archives anciennes ne permettent pas d’identifier réellement un « hameau de Pirmil » circonscrit autour du pont ou sur le coteau.

Pirmil est une croisée entre le chemin de la Rochelle qui dessert l’ouest, celui de la côte Saint-Sébastien qui part à l’est et celui du prieuré Saint-Jacques qui continue vers le sud avec la ligne des ponts. Ce point de jonction des routes commerciales était si important pour la ville de Nantes et plus largement pour le royaume que le nom de Pirmil a rapidement désigné à la fois le bras sud de la Loire nantaise, le pont qui l’enjambe et la forteresse qui le protégeait ; puis par extension tous les hameaux sur la rive sud de la Loire appartenant à la ville de Nantes.

Ce constat rend difficile la compréhension de la physionomie et de l’histoire de Pirmil car toutes les données doivent être analysées avec suspicion : le nom Pirmil est-il attaché à un lieu précis ou désigne-t-il un territoire flou sur la rive sud ?

Le pont

Pour autant, Pirmil est un territoire fondamental pour comprendre les évolutions du rapport à la Loire car ce nom est attaché au pont qui est sans nul doute le plus important de toute la ligne jusqu’à l’époque moderne.

Ce pont, peut-être le premier qui fut construit à Nantes, est l’objet de toutes les attentions de la municipalité depuis que le duc a confié à la ville l’entretien de ces ouvrages en 1397. En effet, dans le bras sud du fleuve, le courant est extrêmement fort et le pont de Pirmil, long d’environ 300 mètres, est soumis à des forces qui le déstabilisent régulièrement. Or, à chaque fois que le pont de Pirmil est emporté par les flots, détruit par vétusté ou malfaçon, la route commerciale et la vie des îles de Loire sont déstabilisées pendant plusieurs années voire plusieurs décennies.

La forteresse

En 1365, le Duc Jean IV fait bâtir par son amiral Nicolas Bouchard une forteresse pour garder le pont et clore la route de la Loire en cas d’attaque mais également pour surveiller tout soulèvement des Nantais. La forteresse est érigée sur un îlot rocheux à quelques mètres de la rive et à la gauche du pont. Le château est donc isolé par un bras de Loire formant une douve.

Il a une forme triangulaire. Au sud, une tour marque l’angle ; au sud-est une petite tourelle est érigée au milieu de sa courtine ; au nord une tour circulaire, aussi imposante qu’un donjon, garde l’entrée principale de l’édifice depuis le pont. Un corps de bâtiment est bâti dans l’angle sud. Dans son rez-de-chaussée sont logés les cuisines, le corps de garde et les prisons ; au premier étage est aménagé le logement du capitaine ; tandis qu’aux étages supérieurs se trouvent les logements des hommes de garde.

La forteresse gouverne un pont en bois et le pont de pierre qui enjambe la Loire. Le pont en bois, doté de deux travées qui le relie à la rive, peut être détruit en cas d’attaque. Aux pieds de la forteresse, trois maisons sont construites le long de la chaussée traversant l’îlot. Il s’agit sans doute de celles que la ville a fait construire à la demande du roi Charles IX pour loger les soldats du château.

Au 17e siècle, le château est vétuste et la Ville demande la destruction de ce bâtiment qu’elle doit entretenir et pour lequel elle doit fournir quotidiennement des gardes. En 1626, Louis XIII accepte le démantèlement et, dix ans plus tard, Dubuisson Aubenay décrit ainsi la forteresse : « La tour que l’on appelle de Piremil, autrement dit Chastel Bouchard, qui est une tour ronde assez mal faite est plus propre à une prison qu’à une forteresse. Elle est environnée de l’eau de Loire, et à force canonnières et fenestres, et semble d’ouvrage de 300 cens ans environ. Aussi dit la Vieille Chronique de Bretagne qu’en l’an 1365 le duc jean le Conquérant s’estant rendu maître de Nantes ordonna à Nicolas Bouchard, son amiral de bastir au bout des ponts une tour à Piremil pour faire la garde, ce qu’il feit. ». En 1646, Lambert Doomer témoigne par sa peinture du délabrement du château qui n’est plus entretenu par la Ville.

Les débuts de l’urbanisation

En 1711, la reconstruction du pont modifie le secteur : le pont reconstruit à la fin du 16e siècle passait à gauche du château, celui du 18e siècle à sa droite. Ce changement d’axe s’accompagne de diverses modifications. Autour de la forteresse, le comblement des douves libère des terrains constructibles et densifie l’habitat : en 1736, la veuve Aubin reçoit l’autorisation de créer une porte ou une sortie de jardin « sur le pont de Pirmil, à cause d'une maison qu'elle a sur l'ancien pont dudit Pirmil, près la tour » ; en 1741, le bureau de Ville donne l’autorisation de faire construire une maison sur l'emplacement de l'ancien pont de bois de Pirmil, tombé en ruines.

Une nouvelle place est créée au débouché du pont. Cette place reste un espace vide au croisement des rues de Dodane, de Saint-Jacques et de Saint-Sébastien. La rue Dodane est prolongée au-delà de l’ancien débouché du pont.

De l’autre côté du pont, la rive de la côte Saint-Sébastien est protégée par un parapet qui met la route à l’abri des flots. Un moulin est également installé au pied de l’ancien donjon, un bief est installé pour l’alimenter.

Enfin, si le pont de pierre est détruit, les arches qui longeaient le château et les anciens logis des gardes sont conservées.

Puis, pendant la Révolution française, la Ville décide de protéger le nouveau pont, par un corps de garde. Au début du 19e siècle, le quartier de Pirmil fait naître de nombreux projets d’aménagements : il bénéficie d’une situation enviable par rapport à l’hospice Saint-Jacques, au pont, ainsi qu’au port. Ainsi, en 1815 la Ville envisage de créer une salle d’asile pour les enfants dans la maison mitoyenne de l’ancien corps de garde.

En 1818, Mathurin Peccot propose un nouveau plan d’alignement pour la place ; ce projet propose la régularisation de la rive, l’agrandissement de la place, le percement de l’îlot bâti face au pont. En 1839, la dernière tour du château est détruite et sa destruction isole la dernière maison sur pont dans la Loire et permet la mise en œuvre du projet de Peccot.

En 1913, une première maison édifiée sur l’ancien pont est abattue. Les dernières, menaçant de tomber en ruine, sont détruites en 1923 par le service des Ponts et Chaussées.

Julie Aycard
Direction du patrimoine et de l'archéologie, Ville de Nantes / Nantes Métropole ; Service du Patrimoine, Inventaire général, Région Pays de la Loire
Inventaire du patrimoine des Rives de Loire
2021

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