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Natation en Loire


Piscines-péniches proposant des cours de natation, sorties familiales sur les plages de Mauves ou de Trentemoult, bains improvisés sur une rive ou depuis une barque. Les bains en Loire, pratiqués tout au long du 19e siècle, ne sont plus autorisés aujourd’hui, cantonnant le plaisir de nager aux piscines municipales et privées. 

Les premiers bains et écoles de natation nantais

En 1827, le conseil municipal étudie « soit dans l’intérêt de la morale publique, soit dans l’intérêt des personnes qui ont l’habitude des bains de rivière pendant l’été », la proposition d’établir à Nantes des bains renfermés à l’instar des bains installés à Paris, Rouen, Bordeaux et dans plusieurs autres grandes villes de France.

En 1831, M. Villette, propriétaire d’un établissement orthopédique, demande l’autorisation de créer sur la Loire deux établissements de bains et écoles de natation : l’un pour les hommes dans le canal Saint-Félix, en dehors du chenal ; l’autre pour les femmes sur la rive gauche du bassin du Port-Maillard vis-à-vis la demi-lune dite le fer-à-cheval. 

A la suite de l’autorisation préfectorale, une première péniche-piscine est amarrée dans le canal Saint-Félix. Réservée aux hommes, elle se compose de deux bateaux soudés ensembles. L’un accueille une dizaine de vestiaires et salles de bain à disposition des nageurs. L’autre est aménagé pour accueillir un bassin créé dans la longueur du bateau : son fond a un plan incliné afin que les nageurs puissent avoir pied à certains endroits et, qu’à d’autres, il soit suffisant pour une pratique satisfaisante de la natation. Sa coque est entaillée à la poupe et à la proue afin de laisser libre cours à la Loire, le fond est recouvert de sable.

La péniche pour dames est, elle, amarrée le long de la prairie aux Mauves, sans doute pour éviter tout risque d’indécence : la présence de femmes en tenue de bain dans l’espace public du cœur de ville aurait choqué une partie de la population. En 1845, les nantaises les plus aisées qui fréquentent l’école de natation, rédigent une pétition pour demander le déplacement de leur école en amont du pont de Belle-Croix, en face du bassin pour homme. Cet établissement dirigé par M. Lamotte propose un autre modèle : sur un bateau de largeur classique, dix vestiaires donnent accès à dix bassins individuels installés transversalement et munis d’un escalier. L’ensemble est couvert par une charpente de bois sur laquelle une toile de chanvre est tendue.

Projet d’un établissement de bains sur la Loire

Projet d’un établissement de bains sur la Loire

Date du document : 18-05-1843

Des bateaux hérités du 18e siècle

Les formes architecturales de ces péniches semblent être une évolution des établissements décrits dans la première édition de L’Encyclopédie de Diderot (1751-1772) : les « bains publics sur la rivière, ne sont autre chose que de grands bateaux, appelés toue, faits de sapin, et couverts d'une grosse toile, autour desquels il y a de petites échelles attachées par des cordes, pour descendre dans un endroit de la rivière où l'on trouve des pieux enfoncés d'espace en espace, qui soutiennent ceux qui prennent le bain ». Ainsi, durant la seconde moitié du 18e siècle, les bateaux ne servent que de vestiaires pour les nageurs qui entrent dans le lit du fleuve. Quelques décennies plus tard, le bateau est devenu un bassin sûr et protégé directement inspiré de l’établissement de M. Turquin, installé sur la Seine parisienne en 1785, et première expérience documentée d’un bateau-école de natation à bassin collectif.

La natation, une pratique à succès

Orthopédistes ou militaires, l’expérience des instructeurs et institutrices de natation affectés à ces établissements est vantée pour séduire le public. Leurs capacités attestent d’une première pratique sportive de la natation à Nantes, sans qu’il soit pour autant possible de préciser si cette pratique est motivée par le plaisir de nager ou par la conscience du danger que représente les eaux du fleuve.

Plan de situation des péniches-piscines

Plan de situation des péniches-piscines

Date du document : 1854

Vers 1840, le succès de ces écoles est tel que les demandes d’autorisation d’amarrage dans les bras de la Bourse et de la Madeleine affluent. Ces établissements qui offrent de se baigner dans l’eau de la Loire cherchent à se placer dans des endroits où les industries naissantes ne sont pas susceptibles de rejeter leurs déchets et autres pollutions. Ce souhait louable n’est pas sans entraîner de nombreuses complications pour le port. En effet, ces péniches-piscines, qui ne fonctionnent que l’été mais sont parfois amarrées toute l’année, gênent le fonctionnement du port en obstruant les arches des ponts et en empêchant la circulation des navires de commerce fluvial. En outre, ils ne cessent de vouloir augmenter leur capacité : en 1858, un projet d’école de natation de 115 cabinets mesurant 60 mètres de long et 8 mètres de large amarré sur le quai de Turenne devant le pont Maudit est soumis.

A la fin du 19e siècle, le nombre de péniches-piscines est régulé et il semble qu’au début du 20e siècle, une seule ait subsisté. L’établissement des « Bains en Loire » est une large péniche avec un bassin central et deux rangées de vestiaires sur ses flancs. Son emplacement fluctue et selon les années, elle est photographiée dans le bras de l’Hôpital sur les deux quais en amont du pont Maudit ou dans le bras de la Bourse devant le château.

Vue panoramique sur la Loire vers le pont Maudit

Vue panoramique sur la Loire vers le pont Maudit

Date du document : 20e siècle

Les plages de Loire

Pour pallier le manque de bassins de natation, la municipalité crée au milieu du 19e siècle un « baignoir » à la Prairie de Mauves. Cette première plage publique fait l’objet d’une amélioration dès 1856 : les clôtures de planches sur la plage sont prolongées, un cordage délimitant l’aire de baignade est mis en place dans le fleuve, et les pierres sont enlevées.

Plage de Mauves

Plage de Mauves

Date du document : 1940

Cette amélioration est concomitante aux premières interdictions préfectorales de se baigner dans le fleuve qui sont répétées à intervalle régulier pendant toute la seconde moitié du 19e siècle. La plage de la Prairie aux Mauves ne semble plus exister à la fin du 19e siècle mais la pratique de la natation en Loire n’a pas disparu pour autant : en 1913, le Neptune-club nantais organise un concours de natation entre les quais de Richebourg et Saint-Anne ; en 1925, l’association sportive ouvrière nantaise installe une nouvelle aire de natation dans le canal Saint-Félix, quai Ferdinand Favre ; et, à la même époque, la plage créée entre Trentemoult et Basse-Île est un lieu très apprécié par la population.

La disparition des péniches-piscines

Le comblement des deux bras nord de la Loire met fin à la pratique de la natation fluviale au cœur de Nantes même si, à l’emplacement actuel du quai Morice, des plages « sauvages » s’improvisent dans les années 1940 et que les chantiers de construction navale ont créé une baignade sur le quai Moncousu. 

Plage sur les comblements du bras de la Bourse

Plage sur les comblements du bras de la Bourse

Date du document : 1951

Pour combler la perte des péniches-piscines, la municipalité étudie dès 1935 les premiers projets de construction de piscines publiques. La piscine Léo Lagrange installée à la pointe de l’ancienne île Gloriette permet à partir de 1951 de se baigner dans le panorama du port.

Pour autant, si la natation en péniche disparaît, la baignade en Loire garde des adeptes malgré les interdictions, et sur la rive sud de nombreuses petites cales et plages naturelles ou aménagées donnent, jusque dans les années 1970, accès au fleuve rafraîchissant en période estivale.

Aujourd’hui, la peur de la noyade dans un fleuve dangereux et puissant ainsi que la prise de conscience sur la pollution du fleuve a mis fin à cette pratique nantaise : ces accès et les plages ont disparu sous la végétation.

Direction du patrimoine et de l'archéologie, Ville de Nantes / Nantes Métropole ; Service du Patrimoine, Inventaire général, Région Pays de la Loire
Inventaire du patrimoine des Rives de Loire
2021

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Rédaction d'article :

Julie Aycard, Julien Huon

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