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Claude Guillon-Verne (1879 – 1956)


Le neveu de Jules Verne, Claude Guillon, est un compositeur nantais oublié. Mais ses œuvres qui peu à peu sortent de l’ombre, prouvent cette injustice.

Claude Guillon-Verne, oublié aujourd’hui, tînt une grande place dans la vie musicale nantaise à son époque.

Son père, Léon Guillon, armateur, épouse Marie Verne, petite sœur et filleule de l’écrivain. Claude admire beaucoup son oncle, même si celui-ci l’intimide. Ils ont plusieurs passions communes.

La naissance et l’enfance  

Claude nait le 26 septembre 1879 dans la demeure familiale de La Boucardière, rue de l’Abbaye, dans le bas Chantenay. Il est le dernier des six enfants du couple.

C’est donc dans une famille bourgeoise aisée qu’il vit, jusqu’à ce que la marine à voile vive ses dernières heures.

Il est pensionnaire tout jeune au prestigieux Externat des Enfants Nantais. Il en souffre et pleure très souvent d’être éloigné de sa famille et particulièrement de sa mère.

Il commence l’étude du piano et de l’orgue. Une audition de Sigurd  de Reyer à Nantes à 11 ans est décisive : il entre plus tard dans la classe d’harmonie de Charles Odion au Conservatoire de Nantes et devient ami avec Paul Ladmirault.

Après de longues discussion, ses parents, confortés par Vincent d’Indy, l’autorisent à aller poursuivre à Paris ses études musicales.

Les études musicales parisiennes

Il étudie de 1903 à 1910 à la Schola Cantorum, école fondée par d’Indy et qui alors rivalise avec le Conservatoire. Roussel est un de ses professeurs.

Beaucoup  de ses œuvres datent de cette époque et sont créées à la Société Nationale de Musique.

Il découvre par ailleurs la musique d’Alfred Bruneau. Debussy le subjugue et devient son idole éternelle : il verra 79 fois Pélleas et Mélisande ! Il n’osera pourtant pas l’approcher de son vivant, mais des liens d’amitié se noueront plus tard avec sa veuve : il nous reste plusieurs lettres d’Emma Debussy à Claude.

La découverte du monde artistique contemporain

En plus des compositeurs, Claude fréquente à Paris des interprètes réputés : le quatuor d’Armand Parent qui interprétera, au salon d’Automne du Grand-Palais en 1908, son quatuor à cordes ; Marie-Louise Beetz, épouse de Henri Casadesus ; et surtout Jane Bathori, venue souvent à Nantes, qui créa à la Schola Cantorum les  Poèmes de la Mer.

Il faut également noter l’intérêt qu’il porte au monde littéraire : Pierre Loti ; François Coppée, un  ami ; Francis Jammes qui sera le parrain de sa deuxième fille Sylvette et Henri Bordeaux, qui lui fournit l’argument de son unique opéra La Visionnaire, créé à Graslin en 1921.

Trois événements marquants

En 1913, il perd ses deux parents. Ces décès entraînent la vente de La Boucardière qu’il aimait tant.

Puis, installé à Reims pour oublier, il rencontre Jeanne Brétignière, issue d’une famille de papetiers industriels belges qui devient un rayon de soleil dans sa vie. Ils se marient en mai 1914. Six enfants naissent entre 1915 et 1930 mais deux décèdent en bas âge. Pour faire vivre sa famille, Claude travaille comme représentant-industriel.

Lorsque la Grande Guerre éclate, Claude est au cœur des événements à Reims puis à Epernay, une fois Reims bombardée. Il est mobilisé, essentiellement dans un escadron du train de réserve des équipages.                                 

L’Entre-deux guerres et la vie à Nantes

La vie reprend peu à peu son cours normal et, le 11e Escadron du train des équipages étant installé à Nantes, Claude Guillon-Verne revient définitivement dans sa ville natale. Nous le retrouverons longtemps domicilié au troisième étage du 15 rue Gresset, dont la vue surplombe également le cours Cambronne.

Il concilie son métier d’industriel avec différentes activités musicales : comme chef d’orchestre, il travaille souvent avec Mme Caldaguès, chanteuse et chef de chœur réputée ; il est co-fondateur de la Boîte à Musique, petite association destinée à promouvoir la musique française et surtout locale ; de 1919 à 1931, c’est au journal L’Écho de la Loire que nous le retrouvons comme critique musical.

Dans ses moments de liberté, quand il ne fait pas d’aquarelles, autre corde à son arc, il compose. C’est Euskualleria ou les Paysages Basques créés à Angers en 1921 ; ce sont les Sept Poèmes Arabes ; le poème « Au Cœur de la Forêt, pour violon et piano ; le Prélude à la Montagne  d’abord pour piano, puis pour piano et orchestre ; le ballet « Nemo découvrant la perle mystérieuse » pour le centenaire de la naissance de son oncle ; le Poème des Îles pour orchestre ; la musique de scène pour Les Tribulations d’un Chinois en Chine, pièce donnée au théâtre Sarah Bernhardt ; et enfin la cantate Sur les Ailes du Rêve.

La Seconde Guerre mondiale et la tristesse d’une fin de vie

Le second conflit mondial marque un point d’arrêt pour le compositeur : « Il n’y a plus de pensée musicale possible ; l’idée de guerre a remplacé les idées. » dit-il.

Comme son oncle autrefois, c’est l’astronomie qui désormais l’absorbe tout entier.

Il partage ses jours entre une petite maison de pêcheur achetée à Belle-Île-en-Mer et la propriété du Tertre à Oudon près d’Ancenis, héritage familial où il s’est définitivement installé en 1930. À Belle-Île, il sympathise avec Arletty : ils feront de mémorables parties d’échecs.

Il s’éteint le 10 février 1956 à Oudon où il repose, mais dans une maison située rue de la Lavanderie : en effet les frais engendrés par le Tertre auxquels il ne pouvait faire face l’avaient obligé à s’en séparer, la mort dans l’âme.

Une personnalité raffinée

Albine nous en parle : « Mon père avait un fort beau visage, grand, mince, avec des yeux rieurs… un homme aux traits fins, distingué dans toute sa personne, mais vivant, frémissant, toujours en mouvement avec des yeux brillants de malice et d’esprit. »

Mentalement, c’était un être sensible, délicat avec une grande culture et une vive intelligence mais timide et réservé, sans aucun esprit d’arrivisme, ce qui explique peut-être son injuste oubli.

Une œuvre à ressusciter

Deux sources d’inspiration émanent de son œuvre. C’est en priorité la mer qui le fascina dès l’enfance, quand en villégiature sur la côte, il regardait inlassablement les vagues se fendre sur les rochers. En cela, il est bien un parent de Jules Verne. Comme lui, l’envie de naviguer le poursuivra  toujours, que ce soit sur son thonier Le Claude Debussy ou, plus tard, glissant calmement sur le Hâvre à Oudon, dans sa barque La Mélisande.

C’est également la nature en général : les arbres, les feuilles et les oiseaux du parc de la Boucardière ou de la forêt du Gâvre, à l’origine de son Poème pour violon, le font vibrer, comme le feront vibrer les montagnes suisses du Mont-Cervin dont le Prélude à la Montagne retrace la splendeur des cîmes.

Une association (l’ACGV)  a été créée pour faire revivre  sa personne et sa musique. Si le corpus mélodique est très important, c’est surtout, dans les œuvres pour orchestre qu’il excelle. Claude Guillon-Verne mérite vraiment de sortir de l’ombre.

Danielle Taitz
2021



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En savoir plus

Bibliographie

Taitz Danielle, Lettres : échanges du compositeur nantais, Claude Guillon-Verne avec sa mère sœur de Jules Verne (correspondance commentée et illustrée), Imprimerie Roudenn Grafik Plévins, 2021

Barbier Patrick, « Un grand compositeur français oublié : Claude Guillon-Verne » in Cahiers de l’académie de Bretagne et des Pays de la Loire, 1994

Biau Gabriel, Claude Guillon-Verne (1879-1956), compositeur nantais  Université de Rennes 2, Mémoire de Master 2, musicologie, 2006

Poté Maurice, Claude Guillon-Verne, Imprimerie des papeteries Catala, 1963

Webographie

Pages liées

Dossier : Jules Verne et Nantes

Conservatoire de Nantes

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Musicien Musique

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Rédaction d'article :

Danielle Taitz

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