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Colinière Habitat rural dans le quartier de Doulon-Bottière

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Hôpitaux


Dans le tissu urbain, l’hôpital constitue un point de repère important par son histoire, la charge émotionnelle qu’il dégage et le volume de ses bâtiments. C’est le cas à Nantes où, au lendemain des bombardements qui l’ont très gravement endommagé, il a été reconstruit sur place, au cœur même de la cité.

Le premier hôpital nantais est édifié intra-muros entre 1503 et 1508, comme le rappelle la rue du Vieil Hôpital située dans le quartier du Bouffay. Le bâtiment élevé sur la rive de l’Erdre occupe un carré de 53 mètres de côté, compte deux niveaux et accueille de 130 à 300 personnes. Il fonctionne grâce aux produits de la charité publique, du revenu d’immeubles de rapport et des fonds de la communauté de ville. Mais son implantation empêche toute extension et ne permet pas d’y recevoir les malades contagieux.

Une première bipolarisation

Pour cette raison, la tenue de l’Asnerie, très en aval sur la Loire, près du marais de Chézine, est acquise en 1569 pour établir un hôpital pour pestiférés, le Sanitat. Après la disparition de la peste, celui-ci devient, au milieu du 17e siècle, un « Hôpital général », c’est-à-dire le lieu d’accueil et parfois d’internement de prostituées, d’enfants abandonnés, d’aliénés… À la fin du 18e siècle, 600 personnes s’y entassent.

Le premier hôpital, très vite saturé, est délaissé pour un nouvel Hôtel-Dieu édifié entre 1644 et 1655 sur l’île Gloriette afin d’écarter de la ville une population considérée comme un péril et de donner à celle-ci un air plus pur. La construction est réalisée à l’initiative du duc de La Meilleraye, gouverneur de Nantes, grâce à un don de la duchesse et à une contribution royale. Les bâtiments sont progressivement étendus sans aucune cohérence et l’insalubrité gagne peu à peu du fait de la proximité de la Loire et des marais. L’hôpital atteint néanmoins 600 lits, ce qui porte à 1200 malades et pensionnaires la population hospitalière nantaise à la veille de la Révolution.

Les conditions d’hospitalisation n’évoluent guère pendant plusieurs décennies. Le Sanitat, rebaptisé hôpital de la Réunion en 1791, est complété en 1827 par plusieurs bâtiments destinés aux aliénés. Puis en 1831, on envisage son transfert sur le site de l’ancien prieuré Saint-Jacques de Pirmil intégré depuis 1790 au territoire de la ville de Nantes. Déjà, à la fin du Premier Empire (1815-1819), 500 mendiants y avaient été transférés. Sur les plans des frères Douillard est édifié l’ensemble des bâtiments qui subsiste encore, témoignage remarquable et unique, localement, de l’architecture hospitalière du 19e siècle. Les deux pavillons d’entrée donnent accès à une vaste cour au fond de laquelle s’élèvent, de part et d’autre d’une chapelle à la façade classique, les bâtiments administratifs et de soin, organisés autour de cours fermées et reliés par des galeries.

Entre 1856 et 1863, l’Hôtel-Dieu est lui aussi reconstruit au même emplacement tout en gagnant de l’espace vers le sud où il côtoie ateliers et industries irrigués par de nouveaux réseaux routier et ferroviaire. Offrant 900 lits, ses bâtiments sont réunis en deux groupes de cinq pavillons à trois niveaux, auxquels sont adjoints dans les premières décennies du 20e siècle de nouveaux services (ophtalmologie, neurologie, radiologie, ORL…). Mais, le 16 septembre 1943, il est touché par un violent bombardement allié.

La seconde bipolarisation

La reconstruction sur place de l’Hôtel-Dieu, devenu Centre hospitalier universitaire, ne s’achève qu’en 1967. Le nouvel établissement, une vaste construction en croix flanquée d’une chapelle, est édifié sur les plans de l’architecte Michel Roux-Spitz, aidé de son fils, auxquels est associé l’architecte nantais Joessel. Mais, dès son inauguration, il semble insuffisant. Aussi, dans les années 1980, un nouvel hôpital est édifié à Saint- Herblain pour satisfaire aux besoins sanitaires de la métropole qu’est devenue Nantes, l’hôpital Laennec. L’ancien hôpital, devenu sanatorium depuis le début du 20e siècle, pour accueillir les malades pulmonaires et cardiaques, situé dans l’ancienne commune de Chantenay, y est transféré. Ces deux pôles hospitaliers publics sont complétés par le centre René Gauducheau, dédié au traitement du cancer, et par de récents équipements construits ou reconstruits sur le site même de l’Hôtel-Dieu, le centre des urgences intégrant une nouvelle hélistation et la maternité hospitalière.

Broussais et Bellier

Deux autres établissements jouent également un rôle dans l’histoire hospitalière nantaise.

L’hôpital militaire Broussais, ouvert en 1914 à Doulon, à proximité des casernes, est doté alors de 174 lits. Au cours de la Grande Guerre lui est adjoint l’hôpital Baur, aménagé sur le site de Saint-Jacques et destiné à faire face aux besoins créés par le conflit mondial : 12 000 blessés y sont soignés en quatre ans. Modernisé en 1951, Broussais ferme en 1983. Le site, qui a trouvé une nouvelle affectation, conserve cependant plusieurs bâtiments témoins de sa première destination.

L’hôpital Bellier, également situé à Doulon, est donné en 1903 au Conseil général de Loire-Atlantique avec une capacité de 21 lits pour soins médicaux, 30 lits pour la chirurgie et 8 pour malades contagieux. Bombardé et partiellement détruit en 1944, il est rapidement reconstruit entre 1948 et 1950. Après une extension en 2003, il est spécialisé en gérontologie et intègre les hôpitaux nantais.

Le CHU sur l'île de Nantes

La question de l’extension du CHU est à nouveau posée au cours de la première décennie du 21e siècle. Faut-il reconstruire sur place le CHU et l’hôpital Laennec ? Réunir les deux dans de nouveaux bâtiments sur l’Île de Nantes ? Déplacer le seul Hôtel-Dieu sur l’Île et densifier le site de Saint-Herblain tout en rapprochant les deux établissements au moyen des nouveaux réseaux de communication ? Le long débat est tranché à l’été 2013 : les hôpitaux seront regroupés sur l’Île de Nantes à l’horizon 2025. Devra être réglé d’ici là le sort des bâtiments conçus par Roux-Spitz dans l’enceinte de l’actuel CHU, qui ont reçu en 2009 le label « Patrimoine du 20e siècle » en raison de leur exemplarité architecturale.

Jean-François Caraës
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
(droits d'auteur réservés)

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En savoir plus

Bibliographie

Kernéïs Jean-Pierre, « Les Hôtels-Dieu de Nantes de 1463 à 1943 », dans La santé en Bretagne des origines à nos jours, Hervas, Paris, 1992, p. 123-138

La Guerenne Claude de, Romieux Yannick, « Les hôpitaux nantais et leur pharmacie des origines
à la fin de l’ère révolutionnaire », Bulletin de la Société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique, n°128, 1992, p. 45-68

La Guerenne Claude de, Romieux Yannick, « Les hôpitaux nantais et leur pharmacie de 1808 à nos jours », Bulletin de la Société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique, n°129, 1993, p. 235-250

Maître Léon, Histoire administrative des anciens hôpitaux de Nantes, Nantes, impr. Mellinet, 1875

« Sur l'île de Nantes : l'hôpital du 21e siècle », Place publique Nantes Saint-Nazaire, n°52, juillet-août 2015, p. 5-47

Webographie

Nantes, la métamorphose d'une ville - Auran/Ina : L'hôpital Nord - Nantes

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Architecture hospitalière d'assistance ou de protection sociale Santé et hygiène

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Rédaction d'article :

Jean-François Caraës

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