Créée par ordonnance royale du 29 juin 1841, la paroisse Sainte-Madeleine doit son nom à la chapelle du prieuré fondé en 1119 sur la Prairie de la Madeleine. Son territoire est simple à délimiter : les deux bras de la Loire en dessinent naturellement les contours.
La construction de la première église
Situé au cœur du lotissement Pelloutier et Cibot sur la Prairie-au-Duc, le projet de la nouvelle église est confié à l’architecte nantais Théodore Nau qui conçoit un édifice de style néogothique. Les travaux démarrent grâce à une souscription des fidèles, complétée par un don des familles Pelloutier et Cibot. Le 10 mars 1844, l’évêque de Nantes, monseigneur de Hercé, procède à l’érection canonique de l’édifice et installe son premier curé, l’abbé François Yviquel. Mais faute de moyens, l’église est inachevée et ne comprend que le chœur, le transept et une travée de la nef, l’ensemble restant sans voûte et sans carrelage.
Les travaux reprennent à partir de 1851 grâce à une subvention de la Ville. L’église est carrelée de granit, voûtée de plâtre et garnie de meubles, tandis que les travaux du presbytère sont achevés. Mais le manque de moyens ne permet pas d’utiliser des matériaux de qualité, nécessaires pour une entreprise de cette ambition. En outre, les fondations faites de larges pierres plates disposées sur un terrain alluvionnaire n’augurent rien de bon quant à la stabilité des murs, des piliers et des voûtes en surplomb. Aussi, à la merci des crues et des vibrations dues aux mouvements des trains, la petite église se dégrade peu à peu. Les dégâts provoqués par la foudre qui frappe le clocher le 7 mai 1889, sont le point d’orgue de ce délitement.
Une première reconstruction
L’architecte Mathurin Fraboulet présente alors un projet d’agrandissement de l’édifice. Afin de permettre l’accueil de 2 000 personnes, il propose de porter sa surface à 800 m² et préconise la conservation du clocher. Quatre ans plus tard, le conseil de fabrique alerte les autorités locales sur les dégradations importantes de l’édifice. Le 26 février 1893, ce dernier est fermé et interdit au culte avant d’être démoli puis reconstruit. Conformément aux vœux de l’architecte Fraboulet, le clocher est préservé.
Dès 1897, avant même l’achèvement des travaux, des malfaçons sont constatées. De longues procédures en justice sont engagées à l’encontre du constructeur Richer mais ne règlent en rien l’état alarmant de l’édifice, qui reste cependant ouvert au culte jusque dans les années 1940. En octobre 1942, la vétusté du clocher est avérée. La flèche est alors déconstruite en mars 1943. Mais la destruction du pont Haudaudine par les soldats allemands, le 12 août 1944, provoque d’énormes fissures. Dès lors, la reconstruction de l’église est inévitable.
La nouvelle église Sainte-Madeleine, fleuron de la construction en béton armé
Dès 1943, l’abbé Moreau s’enquiert auprès de la Ville d’un terrain pour la reconstruction de l’église, mais il faut attendre 1949 pour que le choix définitif soit acté sur un terrain en bordure du boulevard Gustave-Roch. L’année suivante, les plans d’une nouvelle église sont à l’étude. L’inquiétude de l’abbé Moreau est confirmée en mai 1951 : l’élargissement continu des fissures conduit à interdire l’accès au chœur et à réduire la capacité d’accueil à 650 places. Quelques semaines plus tard, la voûte s’effondre.
La conception du nouveau lieu cultuel est confiée aux architectes André Guillou, directeur de l’école des Beaux-Arts de Nantes, et Pierre Joëssel. Ils dessinent un édifice susceptible d’accueillir 2 400 fidèles, soit le quart de la population du quartier. Le plan retenu est en forme de croix grecque, afin que les regards soient dirigés vers l’autel placé à la croisée du transept.
À la fin de l’année 1952, l’entreprise de maçonnerie et travaux publics Le Guillou démarre les travaux. L’ouvrage est conçu selon des méthodes novatrices pour l’époque : les fondations sont constituées de 140 pieux forés à douze mètres de profondeur, et les parois sont supportées par une gigantesque structure métallique. La couverture en tuiles de Beauvais est interrompue par un lanterneau de pavés de verre et de béton qui permet d’éclairer l’espace central. La lumière pénètre également par de hautes et étroites ouvertures ornées de vitraux. Ces derniers, dessinés par Camille Fleury et réalisés par le maître-verrier Pierre Bertrand, ont été offerts par les entreprises du quartier telles que les Docks de l’Ouest, les Chantiers de la Loire, la Raffinerie Say, le chaudronnier Coyac, qui a également réalisé gratuitement les lustres en cuivre rouge.
Le 17 mai 1953, la première pierre est posée. Au total, 50 tonnes de ciment et autant de fer et d’acier sont utilisées pour l’ensemble des ouvrages. Le résultat est un monument à la gloire du béton armé, témoin typique de l’architecture des années 1950. Le 12 décembre 1954, l’évêque, Jean-Joseph Villepelet, bénit la nouvelle église de 1 200 places, soit la moitié du programme originel. L’édifice est en effet inachevé : seule une partie des bras du transept a été réalisée, tandis que le clocher ne sera jamais construit.
Malgré des travaux d’entretien réguliers à partir des années 1960, l’église subit des défaillances électriques et des infiltrations d’eau. Dans les années 2000, ces dernières font naître des inquiétudes au sujet des structures de l’édifice. En 2009, l’édifice doit être rasé et reconstruit à proximité. La menace de démolition suscite alors de vives critiques des architectes et conservateurs du patrimoine, qui soulignent la qualité remarquable de la structure et des espaces intérieurs.
La municipalité opte finalement pour la conservation et met en œuvre un programme de travaux de réhabilitation progressive. Quant à la première église, son emplacement est aujourd’hui occupé par Halte de nuit 44, un centre d’accueil d’urgence des sans-abri, rue de Hercé.
Nathalie Barré
Archives de Nantes
2021
Témoignage (1/7) « Un matin, ils ont trouvé la voûte dans le...
« L’ancienne église a été ébranlée par les bombardements. Le clocher était déjà bien malade. Et ce qui l’a achevée, c’est quand ils ont fait sauter les ponts. Je l’ai connue avec des protections pour empêcher que les pierres tombent. Ils ont commencé...
Témoignage (2/7) « On est rentrés dans la nouvelle église en...
« On est rentrés dans la nouvelle église en 1954. L’évêché avait lancé une collecte pour sa construction. Tous les mois, une personne passait pour vendre des briques. Alors les briques, c’étaient des timbres que l’on achetait. On avait une carte et un...
Témoignage (3/7) « Le samedi, les gars du quartier allaient travailler...
« Ma famille était très impliquée dans la vie de la paroisse, comme beaucoup de familles à l’époque. Beaucoup de gens du quartier et des petits artisans ont travaillé à la construction de la nouvelle église. Ah oui, beaucoup, beaucoup ! Le samedi, les...
Témoignage (4/7) « Une grande cathédrale que l’abbé Moreau comparait...
« L’église de la Madeleine était un petit peu décrite comme pharaonique. Le père Moreau se voyait un peu comme le bâtisseur de la plus grande église. À l’époque de la construction, on lui avait dit qu’il y aurait 30 000 habitants dans 20 ans et qu’il...
Témoignage (5/7) « Les curés étaient proches des paroissiens...
« Autrefois, la vie paroissiale était très importante. Les jours de cérémonie, non seulement la nef et les bas-côtés étaient pleins mais également la tribune. Il y avait quatre messes le dimanche. La pratique religieuse a commencé à reculer vers 1958....
Témoignage (6/7) « C’était pour les jeunes issus du milieu ouvrier...
« Dans les années 60, il y avait la messe des jeunes avec le père Yvernogeau. C’était l’ancien curé des Batignolles. Il y avait un petit-déjeuner après. Il y avait un monde fou ! C’était sympa comme tout. Moi, j’allais là pour rencontrer des jeunes. La...
Témoignage (7/7) « Aujourd’hui, peu de gens du quartier vont...
« Nous avons fréquenté la paroisse Sainte-Madeleine jusqu’au début des années 2000. Ensuite, la communauté de l’Emmanuel s’est installée et la fréquentation de l’église a beaucoup changé après. C’était au moment de la refonte des paroisses. Plusieurs...
Témoignage (1/7) « Un matin, ils ont trouvé la voûte dans le chœur ! »
« L’ancienne église a été ébranlée par les bombardements. Le clocher était déjà bien malade. Et ce qui l’a achevée, c’est quand ils ont fait sauter les ponts. Je l’ai connue avec des protections pour empêcher que les pierres tombent. Ils ont commencé par abattre le clocher mais l’église est restée. Et puis un matin, quand les prêtres sont arrivés pour célébrer la messe, ils ont trouvé la voûte dans le chœur ! Alors là, ils ont avancé l’autel, mais on préférait ne pas trop y aller parce qu’on se demandait toujours ce qui allait nous tomber sur la tête... Surtout quand on voyait ce trou dans la voûte ! » Auteur : Jacqueline Laurens Propos recueillis par les Archives de Nantes en 2000 dans le cadre de « L’Île était une fois »
Témoignage (2/7) « On est rentrés dans la nouvelle église en 1954 »
« On est rentrés dans la nouvelle église en 1954. L’évêché avait lancé une collecte pour sa construction. Tous les mois, une personne passait pour vendre des briques. Alors les briques, c’étaient des timbres que l’on achetait. On avait une carte et un timbre représentait une brique, mais je ne sais plus combien coûtait une brique. » Auteur : Paule Granger Propos recueillis par les Archives de Nantes en 2000 dans le cadre de « L’Île était une fois »
Témoignage (3/7) « Le samedi, les gars du quartier allaient travailler à préparer les terrains »
« Ma famille était très impliquée dans la vie de la paroisse, comme beaucoup de familles à l’époque. Beaucoup de gens du quartier et des petits artisans ont travaillé à la construction de la nouvelle église. Ah oui, beaucoup, beaucoup ! Le samedi, les gars du quartier, dont mon père, mon oncle et beaucoup d’autres, allaient travailler à préparer les terrains, avec les brouettes et tout ça. La grande croix qui est au fond de l’église, les confessionnaux, qui sont aujourd’hui démontés, ainsi que le grand meuble d’orgue, ont été faits par l’entreprise Bousseau, la menuiserie-ébénisterie que mon grand-père tenait avec mon père et mon oncle. » Auteur : Louis Bousseau Propos recueillis par les Archives de Nantes et le groupe mémoire du quartier des Ponts en 2019 dans le cadre de la collection « Quartiers, à vos mémoires »
Témoignage (4/7) « Une grande cathédrale que l’abbé Moreau comparait à celle de Milan ! »
« L’église de la Madeleine était un petit peu décrite comme pharaonique. Le père Moreau se voyait un peu comme le bâtisseur de la plus grande église. À l’époque de la construction, on lui avait dit qu’il y aurait 30 000 habitants dans 20 ans et qu’il fallait une église de 3 000 chrétiens si on comptait 10 % de pratiquants. Maintenant, on est à 2 ou 3 %. Donc, on a commencé des travaux pour construire une grande cathédrale que l’abbé Moreau comparait à celle de Milan ! Mais, en ce temps-là, la pratique financière de l’évêché, c’était de nommer un curé pour bâtir une nouvelle église et de lui dire : « Débrouille-toi pour trouver les fonds ! » Si bien que seulement la moitié a été construite. On a fait le chœur et on a mis de grandes tentures en attendant la construction des bas-côtés mais ils n’ont jamais existé. Le père Moreau a pris bien des initiatives, comme contacter le monde patronal qui a financé les vitraux. C’est pour ça que des industriels ont leur nom dessus. » Auteur : Hubert Champenois Propos recueillis par les Archives de Nantes et le groupe mémoire du quartier des Ponts en 2019 dans le cadre de la collection « Quartiers, à vos mémoires »
Témoignage (5/7) « Les curés étaient proches des paroissiens »
« Autrefois, la vie paroissiale était très importante. Les jours de cérémonie, non seulement la nef et les bas-côtés étaient pleins mais également la tribune. Il y avait quatre messes le dimanche. La pratique religieuse a commencé à reculer vers 1958. Avec la paroisse, des groupes de jeunes se formaient parce qu’il y avait des tas de trucs, selon les âges, pour les filles, pour les garçons. Il y avait des groupes de sport, de la chorale qui était assez importante. Ils se connaissaient donc par toutes ces activités-là et ils se retrouvaient aux offices. En plus, ils allaient à l’école ensemble, une bonne partie en tout cas. On ne cherchait rien d’extraordinaire et il y avait une bonne entente entre les jeunes de la paroisse… C’était extrêmement sympathique. Il y avait beaucoup d’occasions de se retrouver, ça créait des liens. D’ailleurs, pas mal de mariages se sont faits comme ça. » Auteur : Jacqueline Laurens Propos recueillis par les Archives de Nantes en 2000 dans le cadre de « L’Île était une fois
Témoignage (6/7) « C’était pour les jeunes issus du milieu ouvrier »
« Dans les années 60, il y avait la messe des jeunes avec le père Yvernogeau. C’était l’ancien curé des Batignolles. Il y avait un petit-déjeuner après. Il y avait un monde fou ! C’était sympa comme tout. Moi, j’allais là pour rencontrer des jeunes. La JOC était très présente sur la Madeleine et j’en ai fait partie pendant longtemps. C’était pour les jeunes issus du milieu ouvrier. Il y avait la JEC pour les étudiants et la JAC pour les agriculteurs. Cela faisait partie d’une génération du catholicisme. Les réunions se passaient dans les salles en dessous de l’église de la Madeleine. On se retrouvait entre jeunes du même âge, entre filles d’un côté et garçons de l’autre. Par contre, on faisait des veillées ou réunions garçons-filles qui permettaient un lien avec le Foyer des jeunes travailleurs. On croyait qu’on allait changer le monde à l’époque ! Et puis, on s’est aperçus que non... » Auteur : Thérèse Petit Propos recueillis par les Archives de Nantes et le groupe mémoire du quartier des Ponts en 2019 dans le cadre de la collection « Quartiers, à vos mémoires »
Témoignage (7/7) « Aujourd’hui, peu de gens du quartier vont à l’église Sainte-Madeleine »
« Nous avons fréquenté la paroisse Sainte-Madeleine jusqu’au début des années 2000. Ensuite, la communauté de l’Emmanuel s’est installée et la fréquentation de l’église a beaucoup changé après. C’était au moment de la refonte des paroisses. Plusieurs paroisses ont été regroupées en une seule. C’était un mouvement de masse décidé sous Jean-Paul II et c’est là qu’il y a eu des négociations. Le Vatican a demandé à l’évêché de réserver une place à la communauté de l’Emmanuel. » Auteur : Dominique Hervouët Propos recueillis par les Archives de Nantes et le groupe mémoire du quartier des Ponts en 2019 dans le cadre de la collection « Quartiers, à vos mémoires »
Aucune proposition d'enrichissement pour l'article n'a été validée pour l'instant.
Les origines de l’usine de fabrication d’encre et de vernis Valspar remontent à 1842. Son fondateur, Jean-Baptiste Georget, a mis au point un vernis révolutionnaire permettant d’illustrer...
Le 22 octobre 1941, 48 hommes sont fusillés par l’armée allemande à Nantes, Châteaubriant et au Mont-Valérien à côté de Paris, en représailles de l’exécution de Karl Hotz, chef...
L’histoire est parfois cruelle en oubliant la mémoire de ceux qui ont marqué leur temps. Ces célébrités d’une époque deviennent alors des inconnus de l’histoire… Pourtant, en particulier...