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Couvents


L’histoire des couvents, abbayes et maisons religieuses de Nantes ne se distingue guère de celle des autres grandes villes de l’Ouest, si ce n’est peut-être par un renouveau plus marqué au 19e siècle, qu’explique au moins en partie la taille de la ville. Cette histoire dépasse de beaucoup son simple aspect religieux, dans la mesure où les couvents jouent un rôle parfois important dans la vie de la cité, et cela jusqu’à nos jours.

Trois vagues de créations

Les premières installations sont bénédictines et rurales : dès le 8e siècle, à l’est de la ville, des moines venus de Soissons fondent l’abbaye Saint-Médard de Doulon, confirmée par la bulle du pape Eugène II en 824, et le prieuré Saint-Jacques de Pirmil dépend de l’abbaye Saint-Jouin de Marnes. 

La véritable influence monastique sur la ville ne commence donc qu’au milieu du 13e siècle, avec la création en 1246 et 1247 des couvents des cordeliers (ou franciscains) et des jacobins (ou dominicains), réputés pour la qualité de leur prédication et dont les églises accueillent en outre, jusqu’au 17e siècle, les tombes des habitants les plus notables, un rôle dans lequel les Carmes, installés en 1318, les concurrencent jusqu’à accueillir le célèbre tombeau du duc François II. La taille des bâtiments des cordeliers leur permet, en outre, d’accueillir les sessions nantaises des États de Bretagne ou bien encore, à partir de 1682, la cérémonie religieuse d’installation des nouveaux maires. 

Les couvents de ces ordres mendiants, longtemps presque seuls – les Chartreux et les Minimes et, pour les femmes, les Clarisses n’arrivent qu’entre 1445 et 1487 – ne sont réellement concurrencés qu’avec l’exceptionnel mouvement de créations du début du 17e siècle, lié, à Nantes comme ailleurs, à l’approfondissement de la foi dans la ligne du concile de Trente. En une quinzaine d’années se créent en effet à Nantes des couvents de récollets, de capucins, de carmélites, de bénédictines du Calvaire, d’ursulines (enseignantes), de visitandines, tandis que les Cordelières de Sainte-Élisabeth et les Minimes s’installent dans des locaux plus vastes. Un quartier comme Richebourg, aux portes d’une ville qui n’a évidemment plus d’espace à offrir entre ses murs, devient ainsi un véritable quartier monastique. Réceptacle de la vive spiritualité d’une génération, ces couvents sont aussi le lieu d’accueil, pour la formation ou pour toute la vie, de filles de la bonne société.

Carte des couvents en 1756, intra-muros

Carte des couvents en 1756, intra-muros

Date du document : 2013

Les couvents restent cependant des établissements modestes : vers 1520 ainsi, les trois couvents mendiants ne comptent au total que 84 moines et, si la population conventuelle totale semble atteindre 600 personnes à la fin du 17e siècle, au terme du grand mouvement de vocations, Nantes ne compte plus en 1768 que 130 religieux et religieuses de toutes obédiences, répartis alors en dix établissements dont le plus important, celui des récollets, ne dépasse pas vingt moines. À cette date en effet, la grande régression des effectifs est déjà marquée, née de l’impopularité des moines dont le public dénonce le relâchement et l’âpreté. La Révolution ferme les couvents, mais cette mesure consacre simplement l’essoufflement d’un état religieux qui ne séduit plus. Les bâtiments sont dédiés à des usages profanes ou démolis, sans que cela semble affecter la population.

Carte des couvents en 1756, dans et hors les murs

Carte des couvents en 1756, dans et hors les murs

Date du document : 2013

Le renouveau 

Le Concordat de 1801 maintient la suppression des congrégations religieuses mais, en pratique, des « autorisations provisoires » sont accordées dès l’Empire, et le renouveau commence dès 1806 avec le retour des Ursulines. Il s’agit bien d’un renouveau, et pas d’une restauration comme dans le domaine politique après 1815 : les anciens bâtiments des couvents sont abandonnés, ou tellement maltraités, y compris par leurs occupants religieux parfois, qu’ils disparaissent au cours du siècle : une partie de l’enclos des cordeliers avait déjà disparu au 18e siècle pour des raisons d’urbanisme, et leur église est considérée comme démolie en 1874 ; le couvent des clarisses disparaît en 1898, la chapelle des jacobins en 1904…

Plan de Nantes, détail

Plan de Nantes, détail

Date du document : 1756-1757

Les Visitandines réoccupent bien l’ancien couvent des chartreux, mais bâtissent à neuf sous le Second Empire, les Carmélites construisent à deux reprises un couvent neuf, les Clarisses bâtissent entre 1862 et 1866. On assiste même dans certains cas à un double renouveau : expulsées en 1907, suite aux lois anti-congréganistes de la Troisième République, leur couvent devenant par la suite caserne des pompiers, les Ursulines reviennent en 1917 et achètent en 1928 la propriété du Plessis-Tison, route de Paris, cédée par la famille de La Tullaye. Expulsées en 1911, les Clarisses se réinstallent elles aussi en 1917. Les Franciscains, établis en 1887 place Canclaux, y reviennent en 1922, dix-neuf ans après leur expulsion. Le cas des Capucins est plus extrême encore : expulsés en 1880 du couvent qu’ils ont édifié six ans plus tôt rue Noire, puis de nouveau en 1905, ils s’y réinstallent à partir de 1918, et ne quittent définitivement les lieux qu’en 1984. 

Ces péripéties, qui témoignent à la fois de l’histoire nationale et d’une forte volonté d’enracinement local, ne doivent pas faire oublier que la marque conventuelle est très forte à Nantes, grâce à l’emprise foncière des couvents. Le seul couvent des ursulines, ainsi, a permis d’installer le lycée de Nantes et, pour son enclos, le Jardin des plantes ! La conservation des terrains les a longtemps préservés et permis, souvent, d’importantes opérations foncières publiques : le jardin des capucins de la rue Noire devient dès 1993 un parc public, une démarche imitée à une tout autre échelle avec le rachat en 2011 du parc des oblates, une petite congrégation charitable fondée en 1877 à Chantenay par la Vendéenne Sophie-Victorine de Gazeau. L’exemple de cette congrégation est d’autant plus emblématique qu’elle avait déjà cédé une petite partie de ses terrains pour l’installation du foyer Saint-Benoît Labre : les couvents ont été – déjà au temps de Graslin et de la construction du cours Cambronne, aux dépens des Capucins – et sont encore aujourd’hui des réserves foncières.

Aquarelle,  <i>Le cloître de la Visitation</i> 

Aquarelle,  Le cloître de la Visitation 

Date du document : vers 1900

Sauf dans des fonctions éducatives et surtout sociales et de santé – dans certains Établissements hospitaliers pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) surtout –, les congrégations s’étiolent en effet : l’établissement des oblates, encore, est devenu un de ces Ehpad, mais les religieuses y ont réservé 40% des places…

La fondation en 1994 d’un couvent de carmes à la pointe orientale de l’île Beaulieu est donc réellement remarquable, même si elle restera probablement exceptionnelle. 

Alain Croix, Marcel Launay
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
(droits d'auteur réservés)

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En savoir plus

Bibliographie

« Églises et couvents de Nantes », dans La Bretagne d'aprés l'itinéraire de monsieur Dubuisson-Aubenay, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2006, p. 563-671

Martin Henri, Les ordres mendiants en Bretagne : vers 1230- vers 1530 : pauvreté volontaire et prédication à la fin du moyen-âge, Paris, Klincksieck, 1975

« Nantes religieuse de l’Antiquité chrétienne à nos jours : actes du colloque organisé à l'université de Nantes (19-20 octobre 2006) », Bulletin de la Société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique, n° hors série, 2008

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Catholicisme Lieu de culte

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Rédaction d'article :

Alain Croix, Marcel Launay

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