Gros plant
Le gros plant est un cépage hérité de la période de domination du commerce hollandais sur la France du vin au 17e siècle.
Cherchant à faire le commerce d’eaux-de-vie qui soient stables en dépit du transport en mer, les Hollandais favorisent le développement à grande échelle de la distillation. Le gros plant, qui n’est autre que la folle blanche de Cognac, se développe pour ses capacités à produire de forts rendements. En effet, la distillation du vin en alcool entraîne une perte importante de volume qu’il convient d’anticiper par une forte production de raisins.
Pour autant qu’on puisse le savoir, la région nantaise produit des alcools dont la qualité est comparée par les contemporains à ceux de Cognac. Ils sont exportés dans toute l’Europe du Nord, mais surtout en direction du marché anglais qui devient de plus en plus friand d’eaux-de-vie au 18e siècle. Mais tout s’effondre pendant la Révolution française. Le vignoble, soulevé du côté vendéen, est le théâtre d’affrontements militaires. Les colonnes infernales de Turreau rasent le vignoble en 1794 en guise de représailles. La ville perd ses réseaux internationaux en termes de commerce du vin ; un négoce local, plutôt originaire des campagnes, prend le relais. Aussi réduit-il les productions régionales à de petits vins essentiellement vendus en Bretagne. Quant à la production d’eaux-de-vie, elle disparaît faute de pouvoir atteindre les marchés étrangers. Ne subsiste de cette période que le cépage de la folle blanche. Le vin n’est plus distillé, mais consommé sous le nom de gros plant ; son marché devient très local, et plutôt populaire. Il est également utilisé pour produire du vinaigre.
Le gros plant devient un Vin délimité de qualité supérieure (VDQS) en 1954. Il s’agit d’une réglementation spécifique à la France qui vise à faire pénétrer certains vins dans une sorte de sas qualitatif avant de pouvoir prétendre à une appellation d’origine contrôlée. Alors que c’est le cas pour certains vignobles qui suivent bien la démarche d’encouragement à davantage de qualité, comme le cahors qui devient AOC en 1971, le gros plant n’accède à ce statut qu’à la suite d’une réforme de la législation européenne. Supprimant cette catégorie de vin, l’Europe pousse le gros plant à devenir en 2011 une AOC en même temps que 17 des 19 autres anciens VDQS, les deux autres préférant devenir des vins de pays. Car l’AOC est plus exigeante, en termes de parcelles aptes à produire des vins comme de rendements. Les viticulteurs et l’Inao (Institut national de l’origine et de la qualité) avaient déjà effectué un travail important de relocalisation des vignes sur des terrains de meilleure qualité en 1994.
À l’échelle régionale, les vignobles du muscadet et du gros plant ne se superposent pas complètement. Alors que le Sèvre-et-Maine concentre l’essentiel des surfaces en muscadet, le gros plant montre une présence plus forte à mesure que l’on s’éloigne de Nantes. Il est particulièrement présent dans le pays de Retz, et sur les pourtours du vignoble, en direction de la Loire et surtout aux frontières des Mauges. Alors que le muscadet correspond surtout à des exploitations professionnelles spécialisées en viticulture, le gros plant est davantage produit par des exploitations en polyculture, avec de l’élevage laitier par exemple, comme c’est le cas aux abords du lac de Grand-Lieu.
Raphaël Schirmer
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
(droits d'auteur réservés)
En savoir plus
Bibliographie
Brosseau Jean-Louis, « Les cépages du Pays nantais », Études ligériennes, n°7-8, 2004
Saïdi Omar, « De la reconstitution du vignoble de Loire-Inférieure à la promotion de la qualité de ses vins (1844-premier quart du XXe siècle) », Bulletin de la Société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique, n°135, 2000, p. 275-296
Saindrenan Guy, « Les autres vins nantais », La vigne & le vin en Bretagne, Coop Breizh, 2011, p. 449-453
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Raphaël Schirmer
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