Église Notre-Dame de Bon Port
Notre-Dame de Bon-Port est la troisième église érigée dans le quartier du Sanitat, nommé d’après un hospice aujourd’hui disparu. Son dôme paré de zinc et coiffé d’un archange doré figure parmi les emblèmes architecturaux de Nantes.
Les deux premières églises
La première église du quartier est édifiée en 1612. Elle correspond à la chapelle du Sanitat, située dans l’impasse qui donne sur l’hôpital du même nom. L’hôpital du Sanitat n’était en fait pas un établissement où l’on soignait les malades mais plutôt un hospice où étaient accueillis les pauvres, les marginaux, les orphelins et les personnes âgées. En 1825, cette chapelle portant le vocable de Notre-Dame de Chézine est élevée en paroisse. Elle abrite une Église indépendante qui conteste l’autorité papale et revendique une liturgie moderne (messe en français) et des idées progressistes, à contre-courant du conservatisme de la majorité des catholiques français de l’époque. Ce culte est finalement interdit par le pouvoir royal en 1843. La chapelle sera vendue puis transformée en atelier. Suite aux dégâts colossaux provoqués par les bombardements de 1943, ses vestiges sont détruits.
Détail d’un plan de la ville et des faubourgs de Nantes
Date du document : 1723
La deuxième église est construite sur la place Eugène Livet par Mathurin Crucy entre 1824 et 1828, architecte-voyer de la Ville de Nantes. Elle prend le vocable de Saint-Louis en hommage au porteur de ce projet, le maire Louis-Hyacinthe Levesque, et au roi de France Louis IX, canonisé en 1297. Jugé trop étroit, l’édifice est vendu à un particulier en 1860.
Détail d’un plan de Nantes par Bilange
Date du document : 1836
Une église pour le nouveau quartier du Sanitat
Depuis la fin du 18e siècle, une importante politique de transformation urbaine lance l’expansion de la ville vers l’ouest. En 1833, les architectes Louis-Prudent et Constant Douillard sont chargés de la reconversion du terrain occupé par le Sanitat. L’ancien hospice du Sanitat doit être déménagé à l’hôpital Saint-Jacques, alors en cours d'aménagement. En 1843, il est décidé que l’une des parcelles de ce terrain – d’une largeur de 38 mètres sur une profondeur de 47,50 mètres – sera consacrée à l’élévation d’une nouvelle église de plan carré. Le conseil de fabrique de la paroisse qui supervise la construction et l’entretien du mobilier et des édifices religieux, confie le programme architectural à deux architectes nantais, Saint-Félix Seheult et Joseph-Fleury Chenantais. Ils proposent un édifice en forme de croix grecque couronné d’un dôme circulaire et cantonné de quatre chapelles carrées. Ce projet, financé par les dons des fidèles, est validé par le conseil de fabrique en 1843.
Un chantier difficile à mener
La construction débute en 1846 malgré les doute du Conseil des bâtiments civils sur la solidité de l’édifice, en raison de la faible épaisseur des murs. Très vite, le manque de financement retarde le chantier. Chenantais, seul architecte à conserver son poste tout au long de la construction suite à la destitution de Seheult de son poste d’architecte diocésain et du département, parvient à obtenir une participation financière de l’État. Néanmoins, cette aide ne peut être perçue qu’à une condition : les plans de l’édifice doivent être revus afin de concevoir une architecture plus résistante, capable de soutenir la coupole. Chenantais suit les préconisations et réduit la hauteur du tambour sur lequel repose la coupole et dote l’édifice d’une charpente en fer et d’un couvrement en briques. Ce couvrement, plus léger, modifie la forme de la coupole qui devient ovoïde. La Ville de Nantes participe également au financement du chantier. Si l’inauguration a lieu en 1858, le gros œuvre n’est terminé qu’en 1860. L’église ne sera consacrée que le 24 octobre 1883.
Nouvelle église Notre-Dame de Bon-Port
Date du document : 1865
Une architecture aux inspirations italiennes et françaises
L’architecte du monument rappelle celle des églises à plan centré du baroque italien des années 1650, à l’image de l’église San Carlo ai Catinari de Rome, tout en s’inspirant du néo-classicisme français.
L’église est construite selon un plan en croix grecque. La croisée est surmontée d’une coupole de forme ovoïde soutenue par une charpente alliant métal et bois. Grâce à un système de pendentifs, la coupole repose sur quatre piliers reliés par de grands arcs faisant la transition entre le plan carré de l’édifice et le plan circulaire de la coupole. Le peintre Alphonse Le Hénaff réalise les décors des pendentifs et de la coupole. Quatre scènes de la vie de Louis IX sont peintes dans les pendentifs. Parmi les figures ornant la coupole, le saint roi est de nouveau mis à l’honneur. L’artiste a soigneusement représenté la Sainte-Chapelle, édifiée par le souverain, ainsi que la Sainte-Couronne d’épines du Christ, conservée dans ce même lieu.
Un archange doré et une croix s’élevant à 60 mètres de hauteur parent la flèche de ce dôme de 20 mètres de diamètre. Ce dernier repose sur un tambour percé de fenêtres en plein cintre séparées par des pilastres jumelés, coiffé chacun d’un fronton orné de la tête d’un des saints patrons d’une église nantaise et d’une croix.
Archange de l’église Notre-Dame de Bon-Port
Date du document : 29-10-2019
Enfin, les quatre bras voûtés en berceau du plan en croix grecque s’articulent autour de la coupole sur tambour. Quatre petites coupoles occupent les angles de l’église.
Les vitraux, chaires, autels et statues sont réalisées au fur et à mesure de l’arrivée des fonds jusqu’à la fin du 19e siècle.
Vitrail représentant l’Ascension du Christ en l’église Notre-Dame de Bon-Port
Date du document : 29-10-2019
Une façade néo-classique riche en décors
La façade principale de l’édifice s’accorde à l’architecture néo-classique de la place du Sanitat. Le fronton triangulaire soutenant la toiture est orné d’un bas-relief sculpté par Amédée-René Ménard. La Vierge accueille les malheureux met en scène un groupe de quatorze figures avec au centre, l’enfant Jésus, assis sur les genoux de Notre-Dame de Bon-Port. Cette œuvre évoque le départ des marins demandant la protection de Notre-Dame avant leur embarquement sur le navire, puis leur retour sains et saufs au port. Le tympan, réalisé par Joseph Gouézou, représente le Christ Consolateur. Afin de préserver la composition des intempéries, l’artiste a recours à de la peinture au silicate.
L’église Notre-Dame de Bon Port est la seule église de Nantes à porter trois noms. A la demande du maire Louis-Hyacinthe Levesque, elle est aussi appelée « Saint-Louis » d’après Louis IX. Toutefois, le conseil de fabrique de l’édifice préfère le vocable « Notre-Dame de Bon Port » qui la place sous la protection de sainte Marie, tout comme l’était jusque là Notre-Dame de Chézine. Enfin, d’autres la désignent également sous le nom d’église du Sanitat.
Les orgues
Entre 1879 et 1881, le facteur d’orgues nantais Louis Debierre construit le grand orgue de tribune de Notre-Dame de Bon Port. Cet instrument de style néo-classique est remarquable de par les innovations technologiques dont il a été doté, notamment en ce qui concerne la transmission. Il s’agit du système reliant les touches des claviers et du pédalier aux soupapes, c’est-à-dire aux pièces de bois contrôlant le passage de l’air dans les tuyaux et donc la production de sons. Ainsi, la transmission de cet orgue est électrique ou électropneumatique, tandis qu’auparavant elle se faisait de manière mécanique.
Eglise Notre-Dame de Bon-Port
Date du document : 23-05-2016
L’orgue de chœur a également été construit par Louis Debierre en 1894, initialement pour le petit séminaire des Sables d’Olonne. En 1910, l’instrument est remis à neuf par le facteur et transféré à Notre-Dame de Bon Port.
Noémie Boulay
Direction du patrimoine et de l'archéologie, Ville de Nantes/Nantes Métropole
2021
En bref...
Localisation : Sanitat (place du), NANTES
Date de construction : 1845
Auteur de l'oeuvre : Chenantais, Joseph-Fleury (architecte) ; Seheult, Saint-Félix (architecte)
Typologie : architecture religieuse
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Rédaction d'article :
Noémie Boulay
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