Basket-ball
Les quelques dizaines de mètres qui séparaient, ou séparent encore, la Saint-Rogatien de Maryland, la Similienne de la rue Noire ou l’Hermine des Garennes suffisent à prendre la mesure de la densité tant passée que présente de clubs de basket dans l’agglomération nantaise. Cette contiguïté porte la marque de querelles idéologiques particulièrement ardentes sous la Troisième République, lorsque la « guerre scolaire » trouve son prolongement dans le domaine des loisirs à travers la concurrence à laquelle se livrent patronages catholiques et amicales laïques.
Séduction sportive de la jeunesse
À l’instar de leurs homologues parisiens, précurseurs en la matière, les responsables de plusieurs « patros » nantais encouragent la pratique de la balle au panier dans les années 1920 afin de fidéliser et d’élargir leur public. Jusqu’alors pratiqué de manière confidentielle sur le territoire français, le jeu né de l’imagination du pasteur canadien James Naismith conquiert une audience nouvelle en étant associé à la gymnastique sur le modèle allemand et au football association importé d’Angleterre. Localement devancés dans l’entreprise de séduction de la jeunesse menée par leurs adversaires, les amicalistes laïques répliquent en les imitant lors de la décennie suivante, alimentant de la sorte l’essor du basket à Nantes avant-guerre. « Quand, au terme de la vie, vous arriverez aux portes du Paradis, saint Pierre ne vous demandera pas si vous étiez habiles au panier et premiers au cent mètres, mais si vous étiez premiers à la messe le dimanche », s’inquiète toutefois dès le début des années 1930 le directeur d’un patronage confronté à l’indifférence de ses sociétaires pour les questions spirituelles.
L'Hermine et Nantes-Rezé, les clubs héritiers
Joueurs et dirigeants portent un intérêt grandissant, voire exclusif, aux enjeux proprement sportifs. À ce titre, l’ascension dans la hiérarchie compétitive de l’Hermine, chez les garçons, et du Nantes-Rezé Basket, chez les filles, fait figure de symbole. En effet, à la suite du Namneta Sport dans l’entre-deux-guerres, de l’ABC des années 1950 aux années 1970, ou d’Harouys et du NBC dans les années 1980, leurs équipes premières défendent à l’heure actuelle les couleurs de Nantes au plus haut niveau national. Pour les deux clubs phares de l’agglomération, désormais professionnels, le temps des premiers dribbles effectués par quelques débutants dans l’ambiance paternaliste du patronage de la butte Sainte-Anne ou sous la houlette de militants laïcs dans la cour des écoles publiques rezéennes est donc bel et bien révolu.
Cependant, malgré la migration vers le complexe sportif de Mangin-Beaulieu de son équipe fanion, le secteur amateur de l’Hermine reste implanté dans la salle construite en 1960 sur un terrain paroissial. L’utilisation ininterrompue des locaux de la rue Sainte-Marthe, dorénavant mis à disposition de l’association par les œuvres diocésaines, révèle le double visage que présente l’espace du basket nantais à l’aube d’un nouveau siècle. Profondément recomposé dans le sillage d’un jeu devenu sport, il demeure néanmoins paré des signes indélébiles de ses ascendances affinitaires.
Lionel Helvig
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
(droits d'auteur réservés)
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