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Collectif des associations du patrimoine industriel et portuaire Souvenirs d’enfance et de jeunesse de Jules Verne (extraits)

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Hélène Cayeux (1946 – 2017)


Hélène Cayeux arrive à Nantes en 1974, à une époque où le centre-ville vit au rythme des chantiers navals de la Prairie-au-Duc. Elle devient rapidement photographe de presse, pigiste puis correspondante de l’AFP, avant d’intégrer la rédaction locale du journal Ouest-France, en 1985.

Elle est le témoin privilégié et attentif d’un basculement entre une ville industrieuse et populaire, dont l’urbanisme, hérité de la Révolution industrielle, mélange allègrement les différentes classes sociales, vers la métropole moderne du début du 21e siècle, hyperconnectée, associant emplois tertiaires, espaces de loisirs et modes de déplacements « doux ».

Photographe des luttes

Elle est la photographe « des gars de la navale » dont elle suit les combats jusqu’à l’extinction du chantier en 1987. Elle couvre les principales luttes des ouvriers et ouvrières qui résistent avec la dernière énergie à la désindustrialisation du pays, au point que son nom est étroitement lié à la mémoire des « filles de Chantelle », ces femmes qui, par leur obstination à s’opposer à la délocalisation de leur usine (herblinoise) de lingerie, ont gagné le respect de leurs homologues de la métallurgie.

Hélène Cayeux lors de l'exposition  <i> Images de boîtes </i> 

Hélène Cayeux lors de l'exposition   Images de boîtes  

Date du document : 1995

Photographe des mutations du travail

Mais Hélène Cayeux est aussi la photographe de la modernité et de ses conséquences. Elle documente l’apparition de l’informatique dans l’économie, immortalisant les premières machines à commandes numériques ou la lutte des dactylocodeuses de l’INSEE qui, en 1981, dénoncent la pénibilité du travail sur écran. Une lutte à l’occasion de laquelle le journal Le Monde s’interroge sur les « conséquences sociales de l’informatisation » (Jean Benoit, « Les dactylos face aux robots », Le Monde du 13 février 1981). Elle traque les signes de cette modernité jusque dans l’agriculture, produisant des photographies d’exploitations maraîchères dont l’esthétisme semble tout droit inspiré d’un film de science-fiction. Elle représente le travail des chercheurs de l’INRA et des scientifiques de toutes disciplines qui imaginent le monde de demain.

Un laboratoire d’Ifremer, à Nantes, le 11 octobre 1993.

Un laboratoire d’Ifremer, à Nantes, le 11 octobre 1993.

Date du document : 1993

Elle suit la mutation de la ville, la réfection des quartiers populaires autour de la place Viarme ou la construction de nouveaux quartiers. Elle s’intéresse à la vie quotidienne des grands ensembles HLM ou à la renaissance du cours des Cinquante Otages.
La qualité de ses images nous fait découvrir une artiste complète, excellant dans tous les domaines : photographie sociale, photographie industrielle, photographie de paysages, en particulier les rives de la Loire et le littoral atlantique, portraits, photographie d’architecture…

La Raffinerie de sucre de Chantenay, avant sa démolition, depuis le cimetière de la rue des Réformes

La Raffinerie de sucre de Chantenay, avant sa démolition, depuis le cimetière de la rue des Réformes

Date du document : vers 1968

Photographe des « oubliés » et des « invisibles »

Ces talents sont au service d’une sensibilité et d’une attention constante à l’humain. Les personnes sont toujours représentées avec grâce et élégance. Les travailleurs semblent faire corps avec leurs machines au point que l’observateur ne sait plus qui, de l’opérateur ou de l’outil, commande l’autre. Sous son objectif, les pauvres, les plus démunis, les SDF, ne sont pas misérables. Car c’est un trait qu’il faut souligner, Hélène Cayeux est révoltée par la misère. C’est un combat constant au service duquel elle utilise son art, dans la pure tradition de la photographie sociale qui porte en elle l’ambition de pouvoir changer le monde en dénonçant les injustices. Elle photographie l’ouverture de la première antenne nantaise des Restos du cœur, en 1987, elle n’hésite pas à se déplacer dès qu’un taudis lui est signalé. Mais, au-delà de la photographie, elle donne de son temps aux associations caritatives. Elle participe à l’organisation et à l’animation de réveillons pour les plus démunis. Elle bénéficie d’un congé de plusieurs mois pour s’investir à plein temps dans une association qui vient en aide aux SDF de la gare de Lyon, à Paris.

La première antenne des Restos du cœur à Nantes

La première antenne des Restos du cœur à Nantes

Date du document : 03-1987

Car avant d’être Nantaise d’adoption elle est parisienne, née en 1946, à Vaugirard, dans un Paris populaire, à proximité de la grande usine Citroën du quai de Javel (qui cesse son activité seulement en 1975). Fidèle à sa ville natale elle obtient, en 2000, sa nomination au sein de la rédaction nationale de Ouest-France. Un poste, en guise de consécration professionnelle, qu’elle occupe jusqu’en 2003, avant de revenir vivre à Nantes.

20 ans de photos de Nantes en héritage

En 2011, Hélène Cayeux décide de confier au Centre d'histoire du travail (CHT) environ 40 000 clichés argentiques conservés à son domicile. Cet ensemble, assez monumental, documente vingt ans de la vie ordinaire et extraordinaire de la région nantaise : les grandes heures du FC Nantes, la politique, les visites officielles, les accidents industriels, l’actualité sociale et le travail au quotidien… C’est une autre particularité de sa production, depuis les marins pêcheurs des Sables d’Olonne aux ouvrières de l’industrie de la chaussure, dans les Mauges, des ardoisiers de Trélazé aux métallos de Saint-Nazaire, en passant par les ouvriers de l’industrie agroalimentaire, il semble qu’aucune entreprise d’envergure n’ait échappé à son objectif. Elle a su profiter des opportunités que lui offrait son statut de journaliste pour aller au-delà des commandes de sa rédaction et photographier le travail en lui-même, source de toute richesse.
Décédée en 2017, elle ne pourra pas apprécier le livre qu’Alain Croix et moi-même lui avons consacré. Surtout elle n’aura pas eu le temps de mesurer à quel point son œuvre est devenue un élément du patrimoine nantais.

Xavier Nerrière
Centre d'histoire du travail
2009



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En savoir plus

Bibliographie

Croix Alain, Nerrière, Xavier, Le peuple d’Hélène Cayeux – L’œuvre d’une photographe nantaise, Éditions du Centre d’histoire du travail, Nantes, 2017
Cayeux Hélène, Camus, Patrick, Îles de Bretagne, Le Télégramme éditions, Brest, 2008.
Cayeux Hélène, Sclaresky, Monique, Lasacher, Alain-François, Nantes, Hier et aujourd’hui, Éditions Ouest-France, Rennes, 2001.
Cayeux Hélène, Croix Alain, Guidet Thierry, Nantes, Intelligence d’une ville, Éditions Ouest-France, Rennes, 1999.
Cayeux Hélène, Guidet Thierry, Nantes, Éditions Ouest-France, Rennes, 1996

Webographie

Collection Hélène Cayeux à l'iconothèque du CHT Lien s'ouvrant dans une nouvelle fenêtre

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Contributeurs

Rédaction d'article :

Xavier Nerrière

Témoignage :

Joël Busson, Jan-Noël Thoinnet

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