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Hélène Cadou (1922-2014)


La poésie d'Hélène Cadou exprime son attachement à la nature et aux paysages, et porte le souvenir et la voix du poète René Guy Cadou, dont elle fut l'épouse, la muse et la collaboratrice.

Jeunesse

Hélène Laurent (de son nom de naissance) est, comme René Guy Cadou, une « enfant du pays » : elle est née en 1922 à Mesquer, près des marais salants de Guérande. Ses parents, instituteurs, déménagent peu de temps après sa naissance à Pornichet. Sa poésie sera marquée des couleurs et sensations des paysages de son enfance : le bleu du ciel et de la mer, le blanc du sable, du sel, et du soleil se reflétant sur l’eau des marais : « Ce fut un matin blanc / La lumière / Se brisait sur le sol (...) » (Le prince des lisières, Rougerie, 2007).

Hélène Laurent à La Bernerie, photographiée par René Guy Cadou

Hélène Laurent à La Bernerie, photographiée par René Guy Cadou

Date du document : 1943

Très jeune, Hélène Laurent se découvre un attrait pour la poésie : ses premiers carnets datent de 1928, elle a alors 6 ans. Un an plus tard, son père devient directeur d’école dans le quartier de Longchamp, à Nantes. C’est l’arrivée dans la grande ville et la découverte d’autres paysages. Son père a pour collègue un certain Georges Cadou, père de René Guy. C’est par cet intermédiaire qu’Hélène découvre, dès sa parution, le premier recueil du jeune poète de 17 ans, Brancardiers de l’aube : pour elle, c’est une révélation.

Elle s’immerge dans l’écriture, la littérature et la philosophie, étudie au lycée Guist’hau et passe son bac en 1939. Pendant ses études supérieures, elle sympathise avec des poètes et amateurs de poésie dont Julien Lanoë : l’homme de lettres lui propose de participer à un recueil collectif, Sillages. C’est au sein de ce recueil que ses premiers textes paraissent ; elle écrit alors sous le pseudonyme de Claire Jordanne.

La petite équipe de Sillages sollicite René Guy Cadou pour le parrainage du recueil, et va pour cette occasion lui rendre visite à Clisson. La rencontre entre Hélène et René Guy a lieu le 17 juin 1943, et la complicité est immédiate : « Tout le jour je vis bleu / Et ne pensais qu’à toi » (René Guy Cadou, « 17 Juin 1943 », Hélène ou le règne végétal, Seghers, 1952).

Portrait d'Hélène Cadou réalisé par René Guy Cadou

Portrait d'Hélène Cadou réalisé par René Guy Cadou

Date du document : vers 1948

L’âge adulte

Ils se fiancent en 1945 et s’installent l’année suivante à Louisfert, où René Guy est nommé instituteur. Les années qui suivront seront consacrées à l’amour, l’amitié et l’écriture. Alors que René Guy, chaque jour après la classe, s’enferme dans son bureau pour écrire et publie régulièrement, le travail créatif d’Hélène chemine dans l’ombre de son mari. Elle publie néanmoins Trois poèmes en 1949, chez l’éditeur alésien Pierre-André Benoît, et continue de s’intéresser activement à la vie poétique et artistique de l’époque, à travers les amis du couple : les éditeurs Pierre Seghers et René Rougerie, les peintres Roger Toulouse et Marcel Béalu, ainsi que tout le groupe de l’École de Rochefort.

Hélène et René Guy Cadou

Hélène et René Guy Cadou

Date du document : vers 1946

En 1951, la mort prématurée de René Guy, à l’âge de 31 ans, signe la fin de cette « vie rêvée ». Restée seule, Hélène part à Orléans où une place de bibliothécaire lui est proposée. Elle prend son poste aux côtés de Georges Bataille, nommé conservateur en chef, et avec qui elle sympathise rapidement. Jusqu’à sa retraite en 1987, Hélène imprègnera de sa personnalité la vie culturelle de la ville, notamment en étant coordinatrice puis présidente de la Maison de la Culture d’Orléans.

Les engagements, la création

Par ailleurs, sa vie intellectuelle est marquée par deux engagements forts.

Le premier est la volonté de faire vivre l’oeuvre de son mari, à travers de multliples éditions ou rééditions, interventions dans tout le pays et actions dans les écoles et institutions. En 1993, elle inaugure, en partenariat avec la Ville de Nantes, le « Centre René Guy Cadou » qui rassemble les archives du poète, et dont elle assure la gestion. La même année, elle devient conservateur de la « Demeure René Guy Cadou » ouverte dans l’ancienne école de l’écrivain à Louisfert. L’été, c’est elle qui accueille les visiteurs, et organise les animations.

Le second engagement est sa propre création poétique. Auparavant épouse, muse, collaboratrice aux côtés de son mari, Hélène Cadou ouvre peu à peu sa propre voie et publie enfin son premier « vrai » recueil poétique en 1956, Le Bonheur du jour – suivi en 1958 de Cantates des nuits intérieures – chez son éditeur et ami Pierre Seghers.

Poème, C'était lui dans le vent glacé, dans le manuscrit Le bonheur du jour, Hélène Cadou

Poème, C'était lui dans le vent glacé, dans le manuscrit Le bonheur du jour, Hélène Cadou

Date du document : 1956

Au fil de ses écrits – elle a publié plus d’une trentaine de livres – Hélène exprime le souvenir de son mari, porte sa voix par-delà la mort, un peu comme un Orphée au féminin. Outre son amour, les sentiments générés par le deuil et l’absence, Hélène Cadou à travers ses poèmes rend palpables les sensations liées à la fréquentation de la nature, fait surgir des paysages de mer et de sable, des marais de son enfance, ce « Pays blanc » tant aimé. En témoignent des ouvrages comme Si nous allions vers les plages (Rougerie, 2003), Le prince des lisières, (Rougerie, 2007), ou encore les deux livres d’artiste créés en collaboration avec le plasticien Bernard Foucher : Cahiers d’outre-bleu et Outre-Miroir (Alphabet Existentiel, 2003).

Recueil après recueil, son écriture change, se fait plus épurée, tend vers l’essentiel. Certains de ses poèmes évoquent la forme des haïkus japonais :
        
Au matin
La parole
Est une herbe
Qui tremble

Signature.

(Hélène Cadou, Une ville pour le vent qui passe, Rougerie, 1981)

Hélène Cadou s’éteint en 2014. La Bibliothèque municipale de Nantes, en héritant des archives de René Guy et de celles d'Hélène, poursuit le travail de conservation et de valorisation des œuvres des deux poètes, dans la continuité du Centre René Guy Cadou.  

Hélène Cadou est enterrée à Nantes, au cimetière de la Bouteillerie, aux côtés de son mari.

Agnès Borget
Bibliothèque municipale de Nantes
2022



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En savoir plus

Bibliographie

Auffret Benoît, La signature d'une herbe. Hélène Cadou, poète, L'Harmattan, Paris, 2001

Cadou Hélène, J'ai le soleil à vivre, Bruno Doucey Éditions, Paris, 2022

Labbé Mathilde (dir.), Je demeure ta voix retenue : Hélène et René Guy Cadou, Joca seria, Nantes, 2022

Webographie

Site officiel Hélène et René Guy Cadou

Inventaire du fonds d'archives Cadou à la Bm de Nantes

Hélène Cadou à la Bibliothèque municipale de Nantes

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Littérature

Julien Lanoë

René Guy Cadou

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Rédaction d'article :

Agnès Borget

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