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Le dessous des sols : fouille archéologique de la Collégiale Notre-Dame


En 2010, la Direction du Patrimoine et de l’Archéologie a réalisé une étude archéologique et architecturale préalable au ravalement d’une façade d’immeuble située à l’emplacement de l’ancienne collégiale Notre-Dame, aujourd’hui disparue du paysage urbain. Cette opération de diagnostic a permis de retracer l’évolution de la partie nord de l’église, depuis les travaux de la fin du 15e siècle jusqu’à sa transformation en immeubles d’habitation.

Contexte historique

> Avant la collégiale : les origines de l’église Notre-Dame

Les origines de l’église Notre-Dame sont assez floues. En effet, les seuls indices et informations disponibles sont ceux mentionnés par l’auteur anonyme de la Chronique de Nantes (rédigée entre le 11e et le 13e siècle), ainsi que ceux contenus dans les rares descriptions de l’édifice avant sa démolition dans les années 1830. La première mention textuelle d’un sanctuaire dédié à la Sainte-Vierge remonte au début du 10e siècle, au moment où le duc Alain Barbetorte y est inhumé. Cependant, les descriptions architecturales permettent d’envisager une construction plus ancienne de l’édifice, peut-être au 6e ou au 7e siècle. Au cours du 11e siècle, l’église Notre-Dame et les terrains adjacents font l’objet d’une donation de la part des comtes de Nantes : ces propriétés sont transmises à l’abbaye Sainte-Croix de Quimperlé, afin qu’elle y établisse un prieuré. Le prieuré, doté d’un cloître situé au nord de l’église, passe aux mains de l’abbaye Saint-Sauveur de Redon en 1172.

> La collégiale Notre-Dame : un édifice de prestige

En 1325, l’église Notre-Dame accède à un nouveau statut, celui d’église collégiale, c’est-à-dire qu’elle accueille un collège de chanoines (un groupe de prêtres) chargés de célébrer quotidiennement l’office divin et d’assurer les différents rites religieux en l’honneur - et grâce au financement - de riches laïcs. Au cours du 15e siècle, la collégiale Notre-Dame devient ainsi le lieu privilégié des donations faites par les notables membres de la cour ducale et par les ducs de Bretagne : ceux-ci en font un édifice prestigieux en y finançant d’importants travaux de reconstruction et d’embellissement et en y ajoutant plusieurs chapelles funéraires, au sein desquelles ils installent leurs tombeaux. Les travaux d’agrandissements et d’adjonction de chapelles latérales se poursuivent jusqu’à la fin du 16e siècle.

Façade de la collégiale Notre-Dame

Façade de la collégiale Notre-Dame

Date du document : 02-11-2010

> Les travaux de démolition

Après avoir servie d’écurie pendant la Révolution, l’église est vendue comme bien national en 1793. Elle est alors divisée en deux parcelles, ce qui entraîne la création d’une rue passant sous le clocher, coupant l’église selon un axe nord-sud. La partie ouest de l’église, occupée par une fonderie à partir de 1801, est démolie dans les années 1830 pour permettre l’aménagement de l’actuelle place Dumoustier. La partie orientale est quant à elle détruite en 1866 dans le cadre du réaménagement du parvis de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul. Seules les chapelles latérales nord, transformées en immeubles d’habitation, échappent aux travaux de démolition. C’est dans cette partie de l’ancienne église que se situe la façade concernée par l’étude archéologique.

Contexte archéologique

La façade étudiée est celle d’un immeuble situé à l’est de l’actuelle place Dumoustier.

Plan de l'église royale et collégiale de Nantes

Plan de l'église royale et collégiale de Nantes

Date du document : 1865

La superposition des plans anciens et actuels indiquent que cette façade constitue en réalité l’ancien mur élevé entre les chapelles latérales nord et le chœur de l’église.

Les vestiges de maçonneries découverts se rattachent à quatre grandes phases de construction.

Restitution des phases de construction de la façade de la collégiale Notre-Dame

Restitution des phases de construction de la façade de la collégiale Notre-Dame

Date du document : 2010

Le plus ancien élément architectural observé est un arc brisé de grande hauteur, constitué de blocs de tuffeau non moulurés. Cet arc, probablement aveugle (plein), ornait le mur gouttereau nord de l’église, et peut vraisemblablement être rattaché à la campagne de reconstruction du chœur de la collégiale réalisée sous le duc François II, entre les années 1460 et 1480.

La deuxième phase de construction identifiée correspond à la création des chapelles funéraires au nord de l’église. Ces travaux entraînent le réaménagement du mur gouttereau, afin de permettre la communication entre les chapelles et le chœur. Une grande arcade en blocs de tuffeau moulurés est ainsi créée et ouverte à l’ouest de l’arc aveugle, qui est lui-même alors percé d’une petite fenêtre au décor soigné. Cette baie, située en hauteur, devait vraisemblablement être associée à une tribune en bois, et aurait permis aux occupants de ce balcon de suivre - et d’être vu pendant - l’office religieux. Une petite tourelle d’escalier donnant accès à la tribune et aux étages de combles est également édifiée lors de ces travaux, effectués dans le dernier quart du 15e siècle.

La tourelle d’escalier fait l’objet de travaux de réfection sur sa partie supérieure dans une troisième phase d’aménagement, non datée précisément (16e - 18e siècles).

Enfin, la dernière grande phase de travaux observée regroupe tous les aménagements réalisés au cours des 19e et 20e siècles, lors de la transformation des chapelles en immeubles d’habitation (percements de fenêtres, mise en place de conduits de cheminées, réfection de murs, ancrage de poutres...).

Restitution de la collégiale Notre-Dame

Restitution de la collégiale Notre-Dame

Date du document : 2010

Bien que ne portant que sur quelques mètres de murs d’un édifice beaucoup plus vaste, l’étude archéologique a donc permis d’identifier plusieurs éléments architecturaux remarquables, témoignant de la qualité et du caractère prestigieux des aménagements effectués dans la collégiale Notre-Dame à la fin du 15e siècle.

Mathieu Laurens-Berge
Direction du patrimoine et de l'archéologie, Ville de Nantes/Nantes Métropole
2020

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En savoir plus

Bibliographie

Cosneau Claude. Iconographie de Nantes d’après les collections du Musée. Nantes : Musées départementaux de Loire-Atlantique, Musée Dobrée, 1978. 208 p.

Delaval Alain. « Monographie du prieuré de Pirmil et de l’église Saint-Jacques ». Revue 303. Nantes : 1995, n°47.

Laurens-Berge Mathieu. Église Saint-Jacques, Jardins du Chevet, rapport de sondage archéologique. Nantes : DPARC, 2010. 42 p.

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Rédaction d'article :

Mathieu Laurens-Berge

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