
Turcs
Aucun Turc n’arrive à Nantes en 1966 et 1967, et un seul les deux années suivantes : c’est dire si l’immigration turque – pour laquelle Nantes est un débouché absolument secondaire, sans commune mesure évidemment avec les villes allemandes – est un phénomène tardif, amorcé en 1970 seulement et réellement lancé en 1972.
Et la quasi-fermeture des frontières françaises l’année suivante ne laisse qu’environ 200 Turcs à Nantes, presque tous des hommes entre 18 et 40 ans travaillant dans le bâtiment et les travaux publics. C’est un pays tout entier qui livre sa main-d’œuvre à l’Europe occidentale : on ne décèle aucune origine dominante, aucun réseau, pas non plus d’immigration kurde notable, et une très grande diversité qu’illustre encore aujourd’hui l’importance de l’alévisme, une des déclinaisons de l’islam.
Cette immigration se structure pourtant autour de 1980, grâce notamment à la politique de regroupement familial, et elle est depuis demeurée très stable, avec environ un millier de personnes souvent particulièrement attachées à leur culture d’origine. Plus que toute autre, cette « communauté » reproduit ainsi les clivages politiques du pays : un groupe d’extrême droite, organisé autour d’une association et d’un club sportif, se livre ainsi à des agressions de militants de gauche en 2004, et le partage entre laïques et religieux s’est plutôt fait en faveur de ces derniers qui ont tenu à édifier une mosquée spécifiquement turque, bien visible dans le paysage nantais avec son minaret de 18 mètres, et complétée par un actif centre culturel.

 Grand café turc 
Date du document : 1906
Le passage à la deuxième génération pose quelques problèmes, dans la mesure où les plus anciennement installés, parfois devenus chefs d’entreprise, ne comprennent pas toujours les pratiques économiques des nouveaux venus, pourtant très semblables à celles de la génération précédente à ses débuts : la sous-traitance dans laquelle s’inscrivent les entreprises turques, notamment dans le bâtiment, est sans merci. L’emploi dans les entreprises familiales a longtemps répondu aux vagues migratoires successives, en évitant la question de l’adaptation du niveau de langue au pays d’accueil. Cet effort devient aujourd’hui nécessaire pour capitaliser et faire durer les entreprises (négociations dans les marchés) autant que pour trouver des emplois hors du milieu familial.

 Grand café des alliés 
Date du document : années 1940
Le présent est donc profondément différent du temps des années 1960, lorsque les seuls Turcs de Nantes étaient quelques techniciens venus dans les chantiers navals. Évidemment sans rapport aucun avec le temps des quelques « Ottomans » d’avant 1914, chrétiens d’Irak ou du Liban, Grecs d’Asie Mineure ou même diplômé de l’École française de médecine de Beyrouth, victimes de vexations pendant la Première Guerre mondiale qui entraîne aussi la transformation du Grand café turc de la rue de la Fosse en Grand café… des Alliés. Et plus évidemment encore bien loin des tout premiers contacts à Nantes, comme avec ces 34 « Maures turcs » prisonniers qui traversent la ville en 1681, sur le chemin entre Brest et le château de Saumur…
Alain Croix
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
(droits d'auteur réservés)
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Alain Croix
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