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Lycée Clemenceau


Longtemps seul lycée de Nantes et du département, l’actuel lycée Clemenceau a joué depuis le début du 19e siècle un rôle non négligeable dans l’histoire de la ville, encore renforcé par l’implantation tardive d’une université à Nantes. 

Lycée historique créé en 1808

Créé par un arrêté du Premier Consul le 1er vendémiaire an 12 (24 septembre 1803), le lycée de Nantes n’ouvre ses portes que le 1er avril 1808. Installé dans les locaux de l’ancien couvent des ursulines et du séminaire de Nantes, il succède à une École centrale fondée en 1796. Il compte 212 élèves lorsque Napoléon Ier vient visiter l’établissement le 9 août 1808. Dès ses débuts, il subit une vive concurrence de l’enseignement confessionnel local, qui scolarise les enfants de l’aristocratie et une bonne partie de ceux de la bourgeoisie nantaise. Après la chute de l’Empire, le lycée, reconverti en Collège royal, est repris en mains par le nouveau régime et par l’Église, ce qui provoque de sérieux troubles entre 1814 et 1822.

Double tutelle

L’établissement connaît ensuite un net essor dès le provisorat de l’abbé Demeuré qui, notamment, invente dès 1824 les premières classes préparatoires aux Grandes Écoles. À la fin de la monarchie de Juillet, malgré la vive concurrence des établissements religieux, il compte près de 650 élèves. La révolution de 1848 provoque une certaine agitation dans l’établissement (qui redevient lycée) où un professeur, Marc-Lucien Boutteville, est révoqué sous la pression du clergé local pour la publication d’un opuscule anticlérical. Après la loi Falloux de mars 1850, le lycée (à nouveau « impérial » en 1852) tombe sous la double surveillance du préfet et de l’Église, qui lui rendent la vie difficile. 

Sous la Troisième République, malgré l’ouverture d’une annexe (le futur lycée Jules Verne) dans le centre- ville en 1880, le lycée végète quelque peu. Sa vétusté est telle qu’il faut entièrement le reconstruire à la fin des années 1880. Tombé alors à moins de 500 élèves, il connaît de 1890 à 1898 une véritable résurrection grâce à… un ecclésiastique, Léopold Follioley. Dernier prêtre-proviseur d’un lycée d’État en France, il régénère le lycée qui, dans ses nouveaux bâtiments inaugurés en 1892, double ses effectifs en moins de quatre ans. Cette renaissance ne fait pas l’affaire des milieux cléricaux qui publient contre le lycée un pamphlet intitulé Le Péché de Nantes. Ouvrant une nouvelle annexe à Chantenay en 1911, l’établissement ne connaît guère que quelques remous en 1913, provoqués par la publication d’une revue antimilitariste rédigée par quelques élèves non-conformistes ; parmi eux Jacques Vaché, dont la rencontre, trois ans plus tard, avec André Breton, sera l’une des sources de l’aventure surréaliste. 

1919 : la visite de Clemenceau

Pendant la Grande Guerre, le lycée doit abriter un hôpital militaire et accueillir de nombreux réfugiés. Selon un vœu de la municipalité, il reçoit officiellement le 4 février 1919 le nom de Clemenceau, celui-ci venant en personne inaugurer le monument aux morts de l’établissement le 27 mai 1922. La cérémonie est décrite, dans Lettrines, par Julien Gracq, ancien élève, puis professeur de l’établissement. Les bons résultats aux baccalauréats et aux concours gonflent à nouveau ses effectifs qui atteignent plus de 1 500 élèves en 1939. 

Investi en grande partie par l’armée allemande en juin 1940, le lycée connaît pendant la Seconde Guerre mondiale une vie difficile. Malgré l’interdiction des autorités occupantes, des élèves organisent, le 11 novembre 1940, une manifestation patriotique devant le monument aux morts du lycée. Évacué après les grands bombardements de Nantes de septembre 1943 (qui n’épargnent pas l’établissement), le lycée ne peut rouvrir ses portes que le 20 novembre 1944. L’un de ses professeurs, Jean Philippot, devient maire de Nantes quelques mois plus tard.

1973 : la fin du « lycée de garçons »

Les années d’après-guerre sont marquées par de nombreux événements : perte de ses annexes Jules Verne et Chantenay en 1957, fermeture de ses classes primaires (à partir de 1960), puis de son premier cycle d’enseignement secondaire (à partir de 1967), forte contestation scolaire et agitation politique entre 1968 et 1973, année de l’introduction de la mixité dans ce vieux « lycée de garçons », même si quelques filles y étaient admises depuis la fin des années 1960. L’usure du temps se faisant sentir, de grands travaux de rénovation sont entrepris : une première tranche dans les années 1970, une autre, beaucoup plus importante, à la fin des années 1990 par l’agence Lépinay-Chabenès. Les nouveaux bâtiments, notamment la médiathèque et le restaurant scolaire, face au Jardin des plantes, contrastent fortement avec ceux de la fin du 19e siècle. 

Le lycée compte aujourd’hui plus de 1 700 élèves, également répartis entre enseignement secondaire et supérieur, ainsi qu’entre filles et garçons. Les résultats au baccalauréat et aux concours des Grandes Écoles le placent régulièrement dans les quinze meilleurs lycées du pays. 

Aussi l’établissement a-t-il fêté avec éclat son bicentenaire en 2008.

Jean Guiffan
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
(droits d'auteur réservés)



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En bref...

Localisation : Georges-Clémenceau (rue) 1, NANTES

Date de construction : 1880

Auteur de l'oeuvre : Demoget (architecte); Lenoir (architecte); Etève (architecte)

Typologie : architecture scolaire

En savoir plus

Bibliographie

Barreau Joël, Liters Jean-Louis, « Clemenceau, lycée général et technologique, Nantes », Dictionnaire des lycées publics des Pays de la Loire, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, 2009, p. 155-157

Guiffan Jean, « Les catholiques et l’enseignement secondaire public à Nantes », dans Croix, Alain (dir.), Du sentiment de l’histoire dans une ville d’eau, Nantes, L'Albaron, Thonon-les-Bains, 1992

Guiffan Jean, Le péché de Nantes : l’abbé Follioley, dernier proviseur ecclésiastique (1890-1898), Petite Véhicule, Nantes, 1998, rééd. 2007

Le lycée Clemenceau, 200 ans d’histoire, Coiffard, Nantes, 2008

Un grand lycée de province : le lycée Clemenceau de Nantes dans l'histoire et la littérature depuis le Premier Empire, L'Albaron, Thonon-les-Bains, 1992

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Rédaction d'article :

Jean Guiffan

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