Jean Graton (1923-2021)
Jean Graton était un scénariste et dessinateur de bande-dessinée français né à Nantes le 10 août 1923 et décédé le 21 janvier 2021.
La jeunesse à Nantes
Né le 10 août 1923 à Nantes, Jean Graton est élevé au cœur des odeurs et bruits de moteur : son père est commissaire au Club Motocycliste Nantais et organise des courses de motos.
Très vite, il sera confronté aux difficultés de la vie. Sa mère meurt alors qu'il n'a que 11 ans. Il réside alors avec son père au 6 de la rue Rollin. Quelques années plus tard, son père est fait prisonnier au cours de l'invasion allemande. Pour survivre, le petit Jean entre à 17 ans au chantier naval de la ville. Conditions de travail déplorables, milieu insalubre, petits chefs tyranniques, il n'a qu'une seule envie : en sortir !
Mobilisé à Angers pour son service militaire peu après la Libération, son talent pour le dessin le sert ; c'est à lui qu'on demande de décorer les salles de mess, lieux où se réunissent les officiers ou les sous-officiers pour manger en commun. Il envisage d'en faire son métier ; il s'imagine un avenir dans la bande-dessinée, et à cette époque le pays pour cet art est la Belgique !
L’installation à Bruxelles
Jean Graton part de Nantes en 1947 et arrive à Bruxelles, où vit une de ses tantes. Il suit des cours du soir de publicité et réalise des illustrations pour un studio qui devient rapidement le service publicitaire du journal Les Sports. Son destin commence à se préciser.
Spécialisé dans les sujets sportifs, il fait le siège des agences pour trouver des débouchés et débarque un jour à la World Publicité Press où Jean-Michel Charlier le reçoit, un vendredi 13 ! C'est le début de la bande-dessinée « Oncle Paul » dans Spirou et « la petite firme », comme l’appelait Jean Graton, recherchait alors des dessinateurs. Jean Graton passe à l'encre pendant plusieurs jours des planches de Victor Hubinon pour montrer son savoir-faire, puis reçoit ses premiers scénarios à illustrer. Il en réalise rapidement une vingtaine jusqu'à ce qu'on le contraigne à modérer son ardeur, car la publication hebdomadaire n'arrive pas à suivre la production.
Photographie d’identité de Jean Graton
Date du document :
Dessinateur pour le journal Tintin
L'idée lui vient alors de pousser la porte du concurrent direct, le journal de Tintin, où l'idée d'initier cette série a succès vient d’être prise. On lui confie la réalisation d'une histoire complète appelée « La première ronde » qui a pour cadre le grand prix de Formule 1 de Belgique. Nous sommes alors en 1953.
L'histoire plaît à l'éditeur, Raymond Leblanc, mais provoque un petit ouragan : la même semaine, une histoire dans le magazine Spirou et une autre dans le journal de Tintin, dessinées par Jean Graton, sont publiées dans deux revues concurrentes. L’artiste se rappelle : « Nous n’étions que des petits dessinateurs mais c'était un scandale ! On m'a demandé de choisir ! »
Couverture de la bande-dessinée «Tintin – Le journal des jeunes »
Date du document : 1956
Raymond Leblanc ne tarde pas à lui proposer un contrat d'exclusivité en lui promettant qu'il roulera en Ferrari dans cinq ans. Chose qui se réalisera... le temps d'une randonnée ou le patron lui prêtera la sienne !
Jean Graton accumule les récits et propose en 1956 à son rédacteur en chef d'animer un coureur automobile qui pourrait revenir de temps à autre en scène.
La naissance de Michel Vaillant
Jean Graton doit trouver le nom de son personnage, qui doit être courageux : Vaillant est parfait. En face de chez lui habite un passionné de motos dont les fils pilotent. Le plus jeune se prénomme Michel. L'identité du héros sera Michel Vaillant !
À partir de 1957, quelques histoires en quatre pages consacrées à Michel Vaillant testent l’accueil du public. Celui-ci est enthousiaste ; les jeunes lecteurs de Tintin adoptent le héros, et le feu vert est donné pour la réalisation de la première aventure à suivre de Michel Vaillant. C'est le grand départ !
Permis de conduire de Jean Graton
Date du document : 1946
Le premier long récit de la série, Le grand Défi, paraît en 1959. Tout au long des décennies suivantes et des 70 tomes de sa saga automobile, Jean Graton crée un univers formidablement riche et cohérent. Il imagine toute une galerie de personnages : le clan Vaillant, le pilote américain Steve Warson, adversaire numéro un des Vaillant ; le Leader, et sa fille Ruth ; les méchants Bob Cramer et Hawkins. Il emmène ses lecteurs sur les circuits d'Europe et d'Amérique. Des circuits représentés avec d'autant plus de réalisme et de minutie que le dessinateur se rend sur place, prend des photos, dessine, et devient l'ami de très nombreux pilotes, comme Jacky Ickx, Steve Mac Queen, Jacky Stewart et bien d'autres. Tous rêvent de participer au prochain album et d'affronter Michel Vaillant ! Le quadruple champion du monde Alain Prost a toujours dit que sa vocation de devenir pilote lui est venue en lisant les aventures de Michel Vaillant.
Couverture de la bande-dessinée « Le Grand Défi » de la série Michel Vaillant
Date du document : 1959
En 1962 Jean Graton crée son studio. Beaucoup de talentueux dessinateurs viendront l’épauler et rapprendre aux cotés de l’artiste.
En 1966 il lance « Les Labourdet », une bande-dessinée écrite par sa femme Francine et publiée dans l'hebdomadaire Chez nous.
En 1976 il crée un nouveau personnage, Julie Wood, une blonde championne de moto.
En 1982 nouveau défi : il lance sa propre maison d'édition.
En 1994, Philippe, l'un de ses fils, écrit pour son père le scénario d’une nouvelle aventure de Michel Vaillant, La Piste de Jade. L'essai est concluant : il devient le scénariste de la série, lui donnant un nouveau souffle. Il lance aussi Les Dossiers Michel Vaillant, qui racontent la vie de personnages célèbres du monde automobile.
Une relève assurée par son fils Philippe Graton
En 2004, Jean Graton décide de s'accorder une retraite bien méritée et pose ses crayons au studio Graton. La même année, le ministre de la Culture le fait commandeur de l'ordre des Arts et Lettres.
En 2005, en Belgique, il devient chevalier de l'ordre de Léopold. Il reçoit aussi le grand prix Saint-Michel, pour l'ensemble de sa carrière, la plus haute distinction de la bande-dessinée belge.
De son lieu de retraite bruxellois, Jean Graton observe la création d’une nouvelle saison de Michel Vaillant, sous l'impulsion de son fils Philippe et des éditions Dupuis ; les scénarios sont signés Denis Lapierre et Philippe, et aux dessins Benjamin Beneteau et Marc Bourgne. Le premier tome sort en novembre 2012 : Au nom du fils. Le succès est au rendez-vous ! Depuis, onze autres tomes ont vu le jour.
Jean Graton et Patrick Tambay au Grand Prix de Formule 1 des Pays
Date du document : août 1983
Un hommage à Jean Graton rendu sur le circuit
En 2016, le directeur du développement de Graton édition rencontre le responsable de Rebellion racing, une équipe de sport automobile suisse. Tous deux passionnés par l’œuvre de Jean Graton, ils ont l’idée de faire courir une véritable « Vaillante », marque de voiture conduite par Michel Vaillant dans la bande-dessinée lors de ses compétitions sportives. Deux automobiles sont fabriquées pour participer aux 24 Heures du Mans 2017 sous le nom de « Vaillante Rebellion ». Elles portent les numéros 13 et 31.
Voiture Vaillante Rebellion au 24 Heures du Mans 2017
Date du document : Juin 2017
Le 18 juin 2017, une Vaillante Rebellion se classe troisième des 24 Heures du Mans. La Vaillante Rebellion n°31, pilotée par Julien Canal, Nicolas Prost, Bruno Senna, Filipe Albuquerque, remporte le championnat du monde d'endurance dans sa catégorie. La même année, ce modèle devient l’héroïne du nouveau tome de la bande-dessinée Michel Vaillant.
Jean Graton meurt à Bruxelles le 21 janvier 2021 à l'age de 97 ans.
Patrice Allard
2023
En savoir plus
Bibliographie
Chimits Xavier, Graton Philippe, Jean Graton et Michel Vaillant, l'aventure automobile, Hors collection, 2015
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Rédaction d'article :
Patrice Allard
Enrichissement d'article :
Hervé Padioleau
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