Le dessous des sols : fouille archéologique de la place Félix-Fournier
Le réaménagement de la place Félix-Fournier en 2017 a conduit à la mise au jour des vestiges d’un ancien îlot d’habitation démoli au milieu du 19e siècle, lors de la reconstruction de l’église Saint-Nicolas et de son parvis. Un tronçon de l’enceinte urbaine médiévale a également pu être observé.
Contexte historique
La place Félix-Fournier est située sur l’ancienne rive droite de l’Erdre, à proximité de sa confluence avec la Loire, au pied du coteau du Marchix. Pendant l’Antiquité et le début du Moyen Âge, cet espace prenait vraisemblablement l’aspect d’une vaste zone marécageuse non urbanisée. Les premiers indices d’occupation et d’urbanisation du secteur remontent au début du 12e siècle, avec le développement du faubourg du « Bourg-Main », constitué autour de l’église et du cimetière Saint-Nicolas au nord, ainsi que des installations et de la chapelle des Templiers au sud (actuelle rue Sainte-Catherine). Au 13e siècle, le faubourg est inclus à l’intérieur du périmètre fortifié de la nouvelle enceinte de ville, édifiée par le duc de Bretagne Pierre de Dreux. Le quartier poursuit son développement économique et démographique au cours des deux siècles suivants, au point de devenir l’un des plus peuplés et des plus riches de la cité nantaise à la fin du 15e siècle. Devenue trop exiguë, l’église paroissiale Saint-Nicolas fait ainsi l’objet d’une grande campagne de reconstruction dans la seconde moitié du 15e siècle. Les travaux de réaménagement concernent aussi les fortifications protégeant le quartier, qui sont perfectionnées et adaptées à l’usage de l’artillerie à poudre (canons).
Au cours de la période moderne (16e - 18e siècle), la paroisse Saint-Nicolas se développe largement hors des murailles, notamment en direction des quais de la Fosse, où un nouveau quartier à vocation portuaire et commerciale habité par une riche bourgeoisie marchande voit le jour. Bien que désormais quelque peu enclavée et excentrée par rapport au cœur de la paroisse, l’église Saint-Nicolas reste toutefois le lieu de culte principal des habitants. L’accès au vieux quartier Saint-Nicolas n’est revu et facilité qu’à partir du 18e siècle, lorsque les fortifications sont progressivement démantelées pour permettre l’aménagement de grandes places et rues rectilignes (place Royale, rue du Calvaire, porte et quai de Brancas notamment). C’est dans le cadre de ces grands travaux de réaménagement urbain qu’un projet de reconstruction de l’église Saint-Nicolas voit le jour. Longtemps retardé pour des raisons financières, le projet est finalement mis en œuvre à partir de 1835, sous l’impulsion de Félix Fournier, curé de la paroisse. La reconstruction de l’église et le percement des rues adjacentes nécessitent en premier lieu le rachat, puis la démolition, de plusieurs immeubles d’habitation. Les documents d’archives indiquent que ces bâtiments, construits en pan de bois et en pierre de tuffeau et s’élevant parfois sur 6 niveaux, étaient alors insalubres, en mauvais état et mal desservis. La construction de la nouvelle église et l’aménagement de la voirie afférente se font donc progressivement entre 1844 et 1869, au gré des acquisitions d’immeubles. L’architecte en charge du projet, Lassus, élève de Viollet-le-Duc, s’inspire du style architectural des basiliques du Moyen Âge pour la conception de l’église, qui est officiellement inaugurée en 1876.
Fouille Place Félix-Fournier
Date du document : 10-03-2017
Contexte archéologique
La fouille archéologique a permis d’étudier les différents espaces constitutifs d’un ancien îlot d’habitation, disparu au milieu du 19e siècle, lors de la reconstruction de l’église Saint-Nicolas. Les niveaux de rez-de-chaussée et de caves de plusieurs immeubles mitoyens, organisés autour de cours communes intérieures, ont ainsi pu être identifiés
Fouille Place Félix-Fournier
Date du document : 09-03-2017
Certaines pièces mises au jour étaient dans un bon état de conservation, et disposaient encore de leurs sols en carreaux de terre cuite et de leurs cheminées
Fouille Place Félix-Fournier
Date du document : 09-03-2017
Les immeubles étaient équipés de latrines ainsi que de systèmes d’évacuation des eaux usées et pluviales. Les caves étaient desservies par des escaliers en pierre ou en bois.
Fouille Place Félix-Fournier
Date du document : 09-03-2017
Un puits aménagé dans l’une des cours, dont les sols étaient pavés, assurait l’accès l’eau potable. Les objets découverts lors de la fouille (vaisselle, pots à parfums, encriers, monnaies, pipes en terre cuite,...) datent principalement de la première moitié du 19e siècle et témoignent donc de la vie quotidienne des derniers occupants des bâtiments. Quelques indices architecturaux (traces de réparations et de reconstructions de murs, bouchages d’ouvertures, style d’encadrement de portes ou de baie) indiquent quant à eux que certains immeubles de l’îlot ont peut-être été construits dès la fin du Moyen Âge et auraient été habités jusqu’au moment de leur démolition, dans les années 1850.
Quelques mètres de murs de l’enceinte urbaine médiévale (13e - 15e siècle) ont également été observés en bordure de l’emprise de la fouille archéologique, dans le prolongement des vestiges de fortifications visibles dans la rue Duvoisin
Fouille Place Félix-Fournier
Date du document : 17-02-2017
Le mur mis au jour a lui aussi été partiellement démoli lors de l’aménagement du nouveau parvis de l’église Saint-Nicolas. Ce mur, construit en blocs de schiste, était situé quelques mètres au nord de la porte Saint-Nicolas (flanquée de deux tours) et servait d’appui à l’ancienne église Saint-Nicolas, édifiée contre son parement intra-muros.
Franck Chaléat, Camille Dreillard
Direction du Patrimoine et de l'Archéologie, Ville de Nantes / Nantes Métropole
2018
En savoir plus
Bibliographie
Maugard Emmanuel, « La reconstruction de l’église Saint-Nicolas », dans Nantes Flamboyante : actes du colloque organisé par la société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique au Château des ducs de Bretagne, Nantes 24-26 novembre 2011, Société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique, Nantes, 2014, p.109-122
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Rédaction d'article :
Franck Chaleat, Camille Dreillard
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