Maison Carraud-Amieux
Un an après le décès de son beau-père Maurice Amieux avec lequel il dirigeait une conserverie nantaise, Benjamin Carraud poursuit ses activités industrielles en fondant sa propre société, la Maison Carraud-Amieux.
Maurice Amieux, industriel et fondateur avec son gendre Benjamin Carraud de l’entreprise Amieux-Carraud, décède brutalement en mars 1865. Une nouvelle société est alors créée par son ancien associé et ses fils, Maurice et Émile Amieux, qui tentent de poursuivre l’activité de la conserverie et maison de commerce familiale. Mais cette affaire ne dure que quelques mois. Dans la même édition du 23 janvier 1866 de L’Union bretonne paraissent les avis de dissolution de la société « Amieux et Carraud » en date du 13 janvier, de la formation d’une société en nom collectif des « Frères Amieux » le 17 janvier, et du transfert par Benjamin Carraud du siège de sa maison personnelle, commerciale et industrielle.
                Avis paru dans l’Union bretonne du 23 janvier 1866
Date du document : 23/01/1866
Nouveau départ pour Benjamin Carraud
À la suite de cette séparation, les frères Amieux conservent la maison et l’usine de la rue Haudaudine à Nantes et Benjamin Carraud garde l’usine d’Etel. Très rapidement, il embauche un natif de La Grave, comme lui, Jean-Baptiste Claude Jacquier, pour le seconder sur la partie commerciale. Celui-ci devient associé quelques mois plus tard, au 1er janvier 1868, lors de la formation de la société en nom collectif « Carraud-Amieux ». Léon Langlois est également associé à l’affaire. Comme son père, il est très impliqué dans le développement de la conserve nantaise.
                Annonce de la formation de la société Carraud-Amieux dans le Courrier de Bretagne du 1er février 1868
Date du document : 01/02/1868
Benjamin Carraud est de nouveau seul
L’association Carraud Jacquier Langlois est de courte durée. La société est dissoute au 1er mars 1870. Jacquier a repris sa liberté et se déclare alors « fabricant de conserves », domicilié place du Pilori à Nantes. Benjamin Carraud, poursuit seul l’activité, toujours sous la raison « Carraud-Amieux », avec son siège à Nantes et une usine à Etel. Il met au point de nouveaux procédés comme celui d’une cuisson de la sardine sans huile. Mais surtout, il cherche à se créer une image. Il dépose plusieurs marques, met en avant le « roi de carreau », utilise plusieurs fois une écriture en miroir pour signer un slogan comme :
« C’était honneur et plaisir pour les Rois,
De conserver Sardines, petits pois ».
(XUEIMA-DUARRAC)
                Marques de fabrique du 21 avril 1874 de la Maison Carraud-Amieux
Date du document : 21/04/1874
Malgré cette nouvelle identité, il reste nostalgique de ses débuts. Amieux reste toujours accolé à Carraud dans les communications, et il revendique l’année 1850 comme date de création de la Maison Carraud-Amieux.
Les années fastes de la Maison Carraud-Amieux
S’il a revendu dès 1868 à Charles Cassegrain une partie des terres de Saint-Sébastien-sur-Loire acquises avec Maurice Amieux, il reste à Benjamin Carraud de nombreuses parcelles sur cette commune. En 1879, il construit au lieu-dit « La Jaunaie » une fabrique de conserves, des ateliers et des maisons et s’y installe.
En 1884, il fait une nouvelle acquisition à la suite de la faillite de Charles Dehillerin–Tertrais. Il reprend l’usine des Sables-d’Olonne à La Chaume et la très belle villa qui la jouxte. La Maison Carraud-Amieux peut revendiquer trois usines : Etel, La Jaunaie et Les Sables.
                Boîte de thon mariné des Amateurs de la Maison Carraud-Amieux
Date du document : Entre 1884 et 1890
Benjamin Carraud décède à Etel le 5 octobre 1889 à l’âge de 62 ans. Sa veuve Catherine Virginie Carraud-Amieux en a 53. Elle tente un moment de poursuivre les affaires.
La reprise de la Maison Carraud-Amieux par Paul Fraisse
L’affaire est finalement reprise fin 1890 par Joseph Léon Paul Fraisse, jeune clerc de notaire issu d’une famille de négociants. La famille Carraud reste propriétaire des terrains et bâtiments de Saint-Sébastien. Le 31 août 1891, Paul Fraisse s’associe avec Hermeland Bretin, comptable, demeurant à Nantes rue Kervégan, pour la fabrication, l’achat et la vente de conserves alimentaires. La raison sociale est « Fraisse & Cie successeurs de Carraud-Amieux ». La société possède un capital 300 000 francs : 150 000 francs pour Fraisse, 5 000 pour Bretin et 145 000 pour un associé commanditaire, Thomas Dobrée. Ce dernier décède avant la dissolution de la société. Son légataire universel est Hippolyte Marie Durand-Gasselin.
                Encart publié en 1892 dans l’Agenda répertoire du commerce des liquides, vins, spiritueux et boissons diverses
Date du document : 1892
Paul Fraisse doit affronter des années difficiles pour la conserve de poisson, gérer des problèmes commerciaux liés à une qualité contestée, faire face à des grèves. Il s’associe commercialement, quelque temps, avec « Jean Baptiste » Jérôme Amieux, ce qui lui vaut d’être assigné avec lui en justice pour contrefaçon par les frères Amieux.
L’usine des Sables, qui est toujours localement dénommée « Veuve Carraud », est reconnue par l’intendance militaire comme satisfaisante pour répondre à des marchés, mais les commandes semblent se faire attendre et l’activité reste insuffisante. Le 1er juin 1896, Bretin se retire. Il cède à Fraisse ses droits d’associé. Le 5 novembre suivant, la dissolution de la société Fraisse & Cie successeurs de Carraud-Amieux est prononcée.
Une dernière tentative aux Sables
À plus de 60 ans, la « veuve Carraud » veut encore y croire et revient aux affaires. Tenace, elle rachète l’usine des Sables lors de la liquidation de Fraisse en 1897. Elle l’exploite (directement ou en gérance ? Sous quelle marque ?) jusqu’à son décès le 12 mars 1904.
Fin de l’aventure de la branche Carraud
Les héritiers, Nathalie, Marguerite et Pierre, n’ont très nettement pas la vocation pour poursuivre l’œuvre de leurs parents. Le 12 janvier 1905, ils vendent l’usine des Sables à Saupiquet, et en 1908, la villa attenante au député Joseph Chailley.
L’usine de La Jaunaie à Saint-Sébastien-sur-Loire n’a probablement pas repris d’activité après l’échec de Fraisse en 1896. Pierre Carraud et sa femme Marguerite Jacquier y habitent jusqu’en 1913. Ils auraient eu une activité agricole. Le tout est vendu à un particulier et l’usine est démolie en 1914. L’activité industrielle du site de Saint-Sébastien aura duré de 1879 à 1896.
Jusqu’en 1909, la Société Fraisse et Cie continue d’apparaître dans les annuaires mais avec la précision « M. Amieux et Cie, Propriétaires » et sans adresse. La marque « Carraud-Amieux » est aussi passée chez les « Amieux Frères » et est exploitée, au moins jusqu’en 1938.
Pierre Carraud s’installe après la Première Guerre mondiale dans le Morbihan, à Auray, puis près de Pontivy. Il est répertorié comme agriculteur et éleveur de chevaux. Il décède dans sa ferme « Au grand resto » près de Pontivy en 1927. Ses deux sœurs sont restées nantaises jusqu’à leur décès : Marguerite en 1927 et Nathalie en 1936.
Laurent Venaille
Association La conserve des Salorges à la Lune
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