Jansénisme
Cette doctrine de la prédestination se réclamant de saint Augustin est formulée en 1640 par Jansenius, évêque d’Ypres, et diffusée principalement en France par le couvent de Port-Royal.
Un rigorisme condamné par l’absolutisme royal au 17e siècle
Les jansénistes soutiennent que l’homme ne peut accomplir le bien sans le secours de la grâce divine et que c’est Dieu seul qui sauve le pécheur et non ses mérites. De théologique, la question devient politique quand Louis XIV y voit l’amorce d’une opposition et quand le Parlement de Paris l’associe à la question de l’autonomie de l’Église de France à l’égard du pape. La condamnation formelle du jansénisme par la bulle Unigenitus de 1713 ne clôt donc pas la querelle.
Un clergé nantais sous influence janséniste au 18e siècle
Nantes y joue un rôle important, car le diocèse devient un des bastions de la résistance à l’absolutisme royal et à l’infaillibilité papale. Les jansénistes sont à Nantes assez nombreux, sans doute 10% du clergé, et très actifs. Le parti comprend la plupart des religieux et religieuses, la quasi-totalité des prêtres nantais et de nombreux desservants dans les campagnes à l’ouest et au sud du diocèse. Ils ont l’appui de la Cour des comptes, du Présidial et de quelques nobles et bourgeois. La doctrine janséniste a été introduite à Nantes par l’Oratoire qui contrôle les principales institutions d’enseignement : le collège Saint-Clément depuis 1625, la faculté des Arts ainsi que la faculté de Théologie sauvée de la décadence après 1650. L’influence de l’Oratoire se fait aussi sentir sur la communauté de Saint-Clément, communauté qui assure la formation continuée des prêtres diocésains et dont le directeur est Jean de La Noë-Mesnard. Celui-ci qui dirige aussi le séminaire de Nantes, est un ancien oratorien. Son influence à Nantes est très grande, il est apprécié des évêques et l’auteur très respecté du Catéchisme diocésain.
Le conflit commence en 1714 lorsque l’évêque Gilles de Beauvau impose à la Faculté de théologie l’acceptation de la bulle Unigenitus, mais la mort de Louis XIV permet à la faculté de se rétracter. La Noë-Mesnard à qui l’évêque a retiré ses directions, agit de même. Sa mort « en odeur de sainteté » en avril 1717 est prétexte à manifestation janséniste, des miracles sont opérés sur sa tombe dont le culte va se maintenir longtemps. L’évêque répond par des exclusions de la Faculté de Théologie et le contrôle des cours du séminaire, le Parlement de Bretagne casse ses décisions, il faut l’intervention du Conseil du roi en 1723. Le parti nantais continue sa résistance et se distingue par une opposition têtue et procédurière pendant un bon quart de siècle mais, sans possibilité de faire de nouveaux adeptes et sans vrai soutien populaire, il décline irrémédiablement.
La querelle janséniste agite donc Nantes pendant plusieurs décennies, et se traduit par des mesures spectaculaires dans le contexte du temps : le refus des sacrements à des mourants, la censure des imprimés, des descentes de police chez les libraires, des procès suivis d’exils ou d’emprisonnement... Une des victimes les plus connues, le théologien et historien de Nantes Nicolas Travers, doit ainsi quitter la ville.
Une influence persistante au 19e siècle
L’influence de ce courant de pensée du catholicisme est encore perceptible dans le diocèse au 19e siècle à travers un certain rigorisme et, si la mémoire s’en est aujourd’hui perdue, la composition des fonds d’ouvrages religieux de la Bibliothèque municipale autant que la façade de la chapelle de l’Oratoire affichent encore la trace matérielle d’un épisode historique marquant.
François Macé
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
(droits d'auteurs réservés)
En savoir plus
Bibliographie
Bachelier Alcime, « Le jansénisme paroissial dans le diocèse de Nantes au 18e siècle », Bulletin de la Société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique, n°73, 1933, p. 139-154
Bachelier Alcime, Le jansénisme à Nantes, Nizet et Bastard, Paris, 1934
Bachelier Alcime, Essai sur l’Oratoire de Nantes au 17e et au 18e siècle, Nizet et Bastard, Paris, 1934
Durand Yves (dir.), Histoire du diocèse de Nantes, Beauchesne, Paris, 1985 (Histoire des diocèses de France, 18)
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François Macé
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