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Alfredo Gomez Ollero (1905-1943)


Né en Espagne en 1905, Alfredo Gomez Ollero s’engage dès 1936 contre les partisans du coup d’État militaire. Après la défaite de la République en 1939, il s’exile à Nantes où il poursuit son combat contre le fascisme au sein de la Résistance française. Arrêté par l’occupant allemand en septembre 1942, il est fusillé en février 1943 suite au procès dit des « 42 ».

L’engagement contre les fascistes

Alfredo Gomez Ollero est né le 30 septembre 1905 à Paderne de Allariz, province d’Orense située au sud de la Galice au nord-ouest de l’Espagne. Il est le benjamin d’une famille de 8 enfants. Dès l’âge de treize ans, il quitte son village natal en été pour Cordoba (Andalousie) où son père l’initie au métier de cordier. Cette profession est prospère dans cette région propice à la culture du lin et du chanvre. Quand le 18 juillet 1936 éclate le coup d’État militaire orchestré par des généraux fascistes (dont Francisco Franco et Emilio Mola), Alfredo ne tarde pas à rejoindre les milices populaires pour la défense de la République légale. Remarqué par ses qualités, il est promu, dès décembre 1936, au grade de capitaine d’infanterie.

Début 1937, il est incorporé dans la 11e compagnie dirigée par le célèbre et populaire général républicain Enrique Lister. Il est sur plusieurs fronts : Teruel et Madrid où Alfredo est gravement blessé d’une balle en pleine poitrine. Pendant sa convalescence il apprend, le 11 mai 1937, que le sergent Serrino Gomez Ollero, son frère, vient d’être tué sur le front. Suite à l’inexorable avancée des troupes franquistes, il fait partie de ces commandos d’élite chargés de s’approcher des troupes ennemies pour y détruire les installations stratégiques.

Un de ses compagnons d’arme, Camilio Perez, témoigne : « Ces opérations étaient parfois délicates et même très dangereuses. Il ne fallait surtout pas se faire prendre. On n’avait aucun papier d’identité sur nous et si on se fait attraper, il y avait un ordre formel : quitte à te faire tuer autant garder la dernière balle de ton pistolet pour toi. Alfredo était le chef de notre petit groupe ».

Alfredo Gomez Ollero en uniforme de l'armée républicaine espagnole

Alfredo Gomez Ollero en uniforme de l'armée républicaine espagnole

Date du document : Vers 1925

L’exil en France et l’arrivée à Nantes

En janvier-février 1939, le général Franco prend Barcelone, marquant la défaite des républicains. Plusieurs centaines de milliers d’Espagnols fuient les fascistes pour se réfugier France : c’est « la Retirada ». Cet exil signifie pour Alfredo Gomez Ollero et ses compatriotes l’internement dans des camps de concentration français sur les plages d’Argelès puis à Barcarès. Les conditions sont épouvantables. Il manque de tout sauf de fils de fer barbelés. Des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants vont mourir dans ces camps de la honte. Le 16 novembre 1939, Alfredo écrit à sa femme « Je me trouve prisonnier au milieu de ces sables maudits ».

Pour échapper à cette terrible détention, il s’engage dès 1940, comme nombre de ses compatriotes, dans une « Compagnie de Travailleurs Étrangers ». Ces C.T.E. ont été créées pour suppléer au manque de main-d’œuvre dans le pays.

Engagé dans la 178e Compagnie, il se retrouve au Vieux-Doulon à Nantes où il travaille à la construction de la gare SNCF de triage du Grand Blottereau. Il loge dans un meublé situé chemin du Brûlis à deux pas de la mairie de Doulon.

Alfredo Gomez Ollero en uniforme de l'armée républicaine espagnole

Alfredo Gomez Ollero en uniforme de l'armée républicaine espagnole

Date du document : Vers 1925

Un rôle central dans le réseau espagnol de la Résistance

Les C.T.E. deviennent de véritables pépinières pour le Parti Communiste espagnol clandestin qui continue le combat contre l’ennemi commun, le fascisme et le nazisme, en cette France occupée. Alfredo Gomez Ollero s’emploie à recruter et entre en contact avec Albert Brégeon qui le présente à Claude Millot de la Direction Régionale du Parti Communiste français clandestin. Il se déplace à Trignac pour coordonner l’organisation embryonnaire du « camp Franco », situé à Gron sur la commune de Montoir-de-Bretagne. Dans ce camp sont internés 250 républicains espagnols employés de force à la construction de la base sous-marine de Saint-Nazaire.

Puis il diligente à Blain, Benedicto Blanco Dobarro, qu’il a connu sur le front de Madrid, pour élargir le recrutement. C’est aussi Alfredo qui est chargé de constituer des groupes de guérilleros armés dits « Grupo Especial » ou « G.E. » fin 1941-début 1942. À son apogée, l’organisation clandestine atteindra le nombre de 80 membres, dont 16 « G.E. » pour le département, ce qui est considérable. Avec leur expérience militaire, ils deviennent des instructeurs très appréciés des jeunes résistants français engagés contre l’occupant. Les arrestations contre les résistants espagnols débutent à Nantes le 27 juin 1942. Début juillet Alfredo Gomez Ollero entre dans l’illégalité et se réfugie à Trentemoult chez Marcel Boissard. Puis, muni d’une fausse carte d’identité du nom de Bastiani que lui remet Claude Millot, il se met à l’abri près de Nozay où l’instituteur Marcel Viaud lui trouve un emploi dans une ferme.

L’arrestation et le procès des 42

C’est à Nozay qu’il est arrêté par le Service de Police Anti-Communiste (SPAC) le 16 septembre. Une première fiche de police fait état de son écrou « officiel » le 2 octobre : entre ces deux dates, le résistant subit les pires tortures. Le 23 novembre, les Renseignements Généraux établissent un rapport à charge à son sujet : « au moment de son arrestation, il était responsable de toutes les opérations militaires de l’O.S. (Organisation Spéciale) terroriste du P.C. clandestin et du groupe espagnol ».

En janvier 1943 s’ouvre à Nantes le plus grand procès en zone occupée. Au total, 45 Francs-Tireurs et Partisans (dont 2 femmes) comparaissent devant un tribunal militaire allemand. Après une parodie de « procès dit des 42 », le verdict tombe : 37 sont condamnés à mort. Parmi eux cinq républicains espagnols, dont Alfredo Gomez Ollero. Fusillés le 13 février 1943 au terrain militaire du Bêle, leurs corps sont inhumés au cimetière de La Chapelle-Basse-Mer. Ils y reposent toujours.

C’est en ce lieu que chaque année, à la mi-février, une cérémonie honore leur mémoire et leurs combats. À proximité du champ de manœuvre du Bèle, le nom d’une rue rend hommage à Alfredo Gomez Ollero.

Carlos Fernandez
2022

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Carlos Fernandez

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