Fontaines Wallace
Les fontaines Wallace sont des sculptures qui nous sont familières dans le paysage nantais. On les doit à un Nantais, Charles-Auguste Lebourg.
Les fontaines Wallace sont des sculptures en fonte de fer, peintes en vert foncé et hautes de près de 3 mètres pour les grands modèles, les plus fréquents. Le modèle conçu par Richard Wallace lui-même a été finalisé par Charles-Auguste Lebourg, sculpteur nantais, pour faire de ces fontaines de véritables œuvres d’art. Elles ont été pensées pour être faciles à utiliser, agréables à regarder, simples à entretenir et d’un coût abordable permettant une large diffusion.
Sir Richard Wallace, un philanthrope…
Richard Wallace est un Anglais, né à Londres en 1818, qui a vécu la plus grande partie de sa vie à Paris. Peu de temps avant le siège de Paris par l’armée prussienne à partir de septembre 1870, il hérite de la fortune de Lord Hertford, un riche collectionneur d’art dont il était le secrétaire. Resté dans la capitale pendant toute la durée du blocus et de la période de la Commune, Richard Wallace a été le témoin de la souffrance des Parisiens et notamment des Parisiens pauvres. Quelles qu’aient été ses motivations, il finance alors aide alimentaire, aide à l’habillement, au logement, aux soins… à des milliers de personnes victimes des bombardements et des troubles de la période qui a suivi.
Les autorités françaises honorent sa générosité en le décorant de la croix de Commandeur de la légion d’honneur en juin 1871 et la Reine Victoria le fait Sir Richard Wallace la même année.
… qui fait don de fontaines à la ville de Paris
Après les événements de 1870-1871, l’accès à l’eau potable est difficile dans la capitale dévastée. Des aqueducs et des sources d’eau sont détruits, le prix de l’eau potable est très élevé ; la population pauvre qui ne peut s’en procurer a alors recours à de l’eau insalubre puisée dans la Seine, si bien que des boissons alcoolisées paraissent moins risquées qu’une eau malsaine ! Richard Wallace est le témoin notamment des effets dévastateurs de la consommation d’alcool en l’absence d’eau potable, y compris chez les enfants. Il décide alors de faire don à la ville, de fontaines publiques d’eau potable. Les 50 premières (40 grands modèles et 10 fontaines murales) sont installées à partir de juillet 1872. Elles sont communément appelées Les Wallaces.
Estampe, Les fontaines Wallace
Date du document : sans date
Une recherche du beau et du fonctionnel
La forme des fontaines Wallace est particulièrement identifiable dans le paysage urbain. Charles-Auguste Lebourg a réalisé quatre cariatides différentes qui soutiennent sur leurs bras levés le dôme en écailles de dragon, orné d’une pointe et décoré de dauphins. Ces figures gréco-romaines représentent quatre vertus : la bonté, la simplicité, la charité et la sobriété. Si cette dernière évoque la modération et la tempérance, elle pourrait également faire allusion dans ce contexte à la lutte contre l’alcoolisme qui cause des ravages dans les classes populaires. Les pièces des fontaines, qui représentent 600 kilogrammes de fonte, sont coulées en trois morceaux (le socle, la partie centrale et le dôme) par la Société anonyme des hauts fourneaux du Val d’Osne, en Haute-Marne.
Modèle figuratif des fontaines Wallace
Date du document : 07-03-2022
La recherche artistique va de pair avec le caractère fonctionnel de ces fontaines du début des années 1870 : le petit jet d’eau qui coule en permanence du haut du dôme, avec un débit maximum de 4 mètres cube par jour, garantit la pureté de l’eau, le bassin surélevé empêche les chiens errants d’y boire, l’étroitesse des espaces entre les cariatides interdit aux chevaux d’en faire un abreuvoir. La distribution d’eau fraîche est gratuite et deux tasses en fer-blanc, attachées par une chaînette, restant toujours immergées pour plus de propreté, sont à la disposition des buveurs. Pour des raisons d’hygiène, des années plus tard en 1952, ces gobelets ont été supprimés.
Les fontaines Wallace aujourd’hui
Le souci d’hygiène aidant, le « phénomène wallace » s’est répandu dans de nombreuses villes en France et même à l’étranger. Aujourd’hui on trouve encore une centaine des fontaines « grand modèle » à Paris et autant réparties dans d’autres villes françaises et étrangères. Les deux autres modèles, plus rares, la « fontaine en applique » et la « fontaine borne » n’existent plus qu’à Paris, semble-t-il. Des fontaines sont aussi devenues la propriété d’amateurs d’art.
Nantes possède cinq grands modèles de fontaine Wallace : deux au Jardin des plantes (depuis 1906), une place de la Bourse, une au parc de la Gaudinière (depuis 1908) et une cours Cambronne. À l’origine, la ville avait fait l’acquisition de cinq grands modèles et de cinq petits modèles.
Fontaine Wallace au Jardin des Plantes
Date du document : 07-03-2022
Les fontaines Wallace restent d’actualité. La fonderie GHM-Sommevoire a repris le flambeau de la fonderie Val d’Osne en poursuivant leur fabrication. Il est possible de déterminer quelle fonderie est à l’origine d’une fontaine en l’observant attentivement : les lettres GHM se trouvent tout en bas de la base de la fontaine, alors que le nom de la fonderie Val d’Osne est, lui, sur le dessus du piédestal des plus anciennes fontaines avec, sur la facette opposée, le nom de Charles Lebourg et l’année 1872. Il existe aussi à Paris, une association culturelle, la Société des Fontaines Wallace qui a pour objectif de promouvoir, préserver et protéger les fontaines Wallace de Paris.
Charles-Auguste Lebourg
Charles-Auguste Lebourg, né à Nantes en 1829, n’était pas un inconnu pour Wallace puisqu’il avait déjà réalisé des bustes en marbre pour la famille Hertford qui l’avait élevé. Si les cariatides constituent l’œuvre la plus connue de Charles-Auguste Lebourg, elle n’est pas la seule qu’on peut admirer à Nantes. La statue équestre de Jeanne d’Arc, conçue à partir de 1899 (mais installée seulement en 1913, sept ans après la mort du sculpteur), fait face à la basilique Saint-Donatien et Saint-Rogatien. Par miracle, elle a échappé aux fontes de bronze, pendant la Seconde Guerre mondiale, sous le régime de Vichy. Ce qui ne fut pas le cas de deux autres sculptures : la statue du Docteur Ange Guépin dressée place Delorme et le buste du Docteur Ecorchard au Jardin des plantes. On trouve encore d’autres œuvres dans notre ville : la sculpture du Fantassin pour le Monument à la gloire des combattants de 1870, cours Saint-Pierre, le médaillon en bronze d’Émile Mellinet sur sa sépulture au cimetière Miséricorde, l’Enfant à la sauterelle et la prêtresse d’Euleusis au Musée d’art…
L’œuvre de Charles-Auguste Lebourg est considérable et ses réalisations ne se limitent pas aux fontaines Wallace et à sa ville natale, comme en témoigne, sur la façade ouest de l’Hôtel de Ville de Paris, sa sculpture de la Ville de Nantes.
Daniel Coutant
2022
Album « Les fontaines Wallace de Nantes »
En savoir plus
Bibliographie
Croix Alain (dir.), Dictionnaire de Nantes, Presses Universitaires Rennes, 2013
Delouche Denise, Mémoires sculptées, Presses Universitaires de Rennes, 1994 (Collection Arts de l'Ouest/Regards)
Lhomeau Eric, Roberts Karen, L’histoire des fontaines Wallace, Le Veilleur De Nuit, 2008
Webographie
Site internet de la société des Fontaines Wallace
La fabrication des fontaines Wallace
Documentation
Sir Richard Wallace, le bienfaiteur de Paris le grand philanthrope
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Contributeurs
Rédaction d'article :
Daniel Coutant
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