Cité et jardins du Bois-Hardy
Parenthèse dans la ville, les jardins des coteaux du Bois-Hardy sont une « bulle » intimiste et sauvage au cœur du quartier du Bas-Chantenay. Si leur surface s’est réduite avec le temps, les jardins du Bois-Hardy sont pourtant bien ancrés sur le territoire et ont une histoire riche et ancienne.
Le plan cadastral de 1833 mentionne un lieu-dit Bois-Hardy à l’ouest du bourg de Chantenay sur le coteau entre les rues des Alouettes et de l’Abbaye et l’actuel boulevard Maréchal Alphonse Juin. Ce secteur est composé de nombreuses petites parcelles agricoles laniérées et de quelques maisons.
Détail plan cadastral parcellaire de la commune de Chantenay. 1833.
Date du document : 1833
Au cours de la seconde moitié du 19e siècle, le sud du quartier s’industrialise avec l’implantation d’usines : raffinerie, papeterie, chantiers navals, usine d’engrais… L’arrivée d’ouvriers et ouvrières entraîne une urbanisation du coteau. Entre 1872 et 1906, le lieu-dit Bois-Hardy voit son nombre de ménages tripler, passant de 57 à 178, et sa population doubler, de 233 à 583 habitants.
La cité ouvrière Arthur Benoit
En 1905, la Société nantaise anonyme d’habitations salubres et à bon marché, acquiert des terres agricoles au Bois-Hardy (au niveau de l’actuelle avenue Arthur Benoit). Cette société est représentée par le docteur Bertin et un groupe d’industriels chantenaysiens comprenant des représentants de l'usine Kuhlmann ou encore de la raffinerie de Chantenay. L’objectif est la construction de la première cité ouvrière de Chantenay. Après concours, les architectes Louis Capelle et Gabriel Guchet sont choisis pour la construction. Ils dessinent un lotissement de 19 maisons jumelles desservi par un système de voirie en boucle et doté d’un pavillon du concierge à l'entrée.
Plan de la cité Arthur-Benoît
Date du document : Début 20e siècle
Le programme précise qu'il « sera tenu compte non seulement de l'économie de la dépense et de la bonne disposition des habitations, mais aussi de la variété et de l'esthétique susceptible de donner à l'ensemble du groupe un aspect plus agréable et pittoresque ». Les maisons sont construites dans une maçonnerie de granit en opus incertum, sur un soubassement et des pignons enduits. Des couvertures à deux versants en tuiles mécaniques, remplacées occasionnellement par de l'ardoise, surmontent les habitations. Les logements possèdent une cuisine, une salle commune et une à deux chambres.
La cité prend le nom d’Arthur Benoit en 1932. Ce dernier né en 1843 et décédé en 1923 fut successivement officier de cuirassiers, président du tribunal de commerce de Nantes et conseiller municipal en 1892.
Chantenay, la cité ouvrière du Bois-Hardy
Date du document : Début 20e siècle
Les jardins ouvriers et tenues maraîchères
Si le long des voies de circulation de nombreuses maisons s’implantent, le cœur du quartier reste agricole avec des jardins ouvriers. Ils servent à subvenir aux besoins alimentaires des familles. En mai 1898, le conseil municipal de Chantenay observe que « … la plupart des ouvriers de ces usines demeurent au Bois-Hardy et au Plessis-Cellier [et] trouvent dans ces villages des logements à bon marché avec de petits jardinets pour la culture des légumes nécessaires au ménage... ».
Les anciens gardent la mémoire d’une rue du Bois-Hardy particulièrement animée le soir à l’heure de la débauche lorsque des centaines d’ouvriers regagnent leur maisons, où les attend souvent une deuxième activité dans leur jardin. Agrémentés de cabanons fait de matériaux de récupération et de nombreux bidons pour récupérer l’eau de pluie, les jardins et parcelles sont séparés par des allées. La journée, les enfants y trouvent un véritable terrain de jeu et beaucoup de garçons jouent au ballon sur les terrains vagues situés entre les jardins et les usines du Bas-Chantenay.
Photographie aérienne centrée sur les jardins du Bois-Hardy, 1956
Date du document : 1956
Sur le coteau sont aussi présentes plusieurs petites parcelles de vignes. La période des vendanges est alors l’occasion d’aller ramasser les raisins puis de les fouler au pied dans la bonne humeur avec une partie des habitants du quartier.
Si l’industrie représente 2/3 des emplois des habitants du Bois-Hardy au début du 20e siècle, un nombre encore significatif de cultivateurs ou de jardiniers rappelle l’activité agricole jadis prédominante. Ainsi subsistent quelques tenues maraîchères où se cultivent des légumes primeurs, dont les fameuses carottes de Chantenay. Tous ces légumes alimentent les conserveries locales.
Cueillette des petits pois devant l'une des usines Amieux-Frères
Date du document : 20e siècle
Mobilisation et concertation autour des jardins
Dans la seconde moitié du 20e siècle, les jardins sont encore cultivés, mais leur emprise diminue progressivement.
À la fin des années 2000, la Ville de Nantes préempte les terrains du coteaux du Bois Hardy dans la perspective d’un futur aménagement urbain. En 2017, le projet se dessine avec la création de 400 nouveaux logements. La présentation aux habitants suscite inquiétudes et colères. Le secteur est alors occupé avec la mise en place d’un jardin partagé entretenu par une cinquantaine de personnes. L’objectif du collectif : maintenir des espaces de biodiversité dans la ville.
Atelier citoyen au Bois-Hardy
Date du document : 15/04/2023
Suite à cette mobilisation, les élus mettent en place des ateliers de concertation. Un nouveau projet émerge fin 2022 intégrant les enjeux de transition sociale, écologique et économique. Délimité à l’origine à 4000 mètres carrés, le secteur comprenant les jardins, une zone humide ainsi qu’un espace de biodiversité passe à 12 800 mètres carrés et est inscrit en zone naturelle au plan local d’urbanisme métropolitain. Le nombre de logements est réduit entre 265 et 275.
Atelier citoyen au Bois-Hardy
Date du document : 15/04/2023
En 2023, un atelier citoyen travaille à définir le plan des jardins, leur gestion dans l’esprit d’un « commun urbain » et les actions à mettre en place associant usagers, riverains et la Ville dans une logique d’expérimentation. Ainsi, de nouvelles plantations d’arbres fruitiers, un lieu collectif abrité pour se retrouver et des cheminements améliorés devraient voir le jour en 2024 et 2025.
Elven Pogu
Direction du patrimoine et de l’archéologie, Ville de Nantes/Nantes Métropole
2024
Album « Cité et jardins du Bois-Hardy »
En savoir plus
Bibliographie
Archives municipales de Nantes, Le Chantenay de Griveaud du 4 au 26 septembre 2004, Nantes, Imprimerie Municipale, 2004
Webographie
Présentation du projet d'aménagement du Bois Hardy sur le site du Dialogue Citoyen
Pages liées
Prairie industrielle du Bas-Chantenay
Autour du Bois-Hardy et de la Boucardière, parcours des coteaux
Tags
Contributeurs
Rédaction d'article :
Elven Pogu
Vous aimerez aussi
Apothicaires
Société et cultureDans l’univers corporatif, il était de tradition de réunir les épiciers, les droguistes et les apothicaires, même si chaque profession avait ses spécificités.
Contributeur(s) :Guy Saupin
Date de publication : 20/11/2023
116
Église Sainte-Croix
Architecture et urbanismeSituée au cœur du quartier Bouffay, l’église Sainte-Croix était rattachée au prieuré de Marmoutier, fondé au 12e siècle. Reconstruite à partir de 1669, sa façade est couronnée du beffroi...
Contributeur(s) :Noémie Boulay
Date de publication : 12/09/2024
393
Cité HBM de la Chevasnerie
Architecture et urbanismeLes HBM de la Chevasnerie constituent un des exemples de cités-jardins nés à Nantes dans l'entre-deux-guerres. Avec la cité-jardin, c'est une nouvelle façon d'habiter qui se diffuse.
Contributeur(s) :Nathalie Barré , Renée Jouan
Date de publication : 28/02/2019
2961