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Gilbert Burlot (1917-1968)


Gilbert Burlot, haut fonctionnaire, résistant, déporté à Dachau, est né le 21 février 1917 à Nantes et décédé le 27 juillet 1968 à Nantes. Marié, il aura 5 enfants. Au moment de son décès, il était maire de la Bernerie-en-Retz. Pierre Leduc, conseiller général, dira lors de ses obsèques : « Pour avoir aimé sa patrie, il lui donna ses forces, c’est encore par devoir qu’il vient de payer de sa personne ».

Une carrière au service de la nation

Gilbert Burlot est le fils d’Henri Burlot, directeur régional des Chèques Postaux de Rennes originaire de la Bernerie-en-Retz, et d’Henriette Piriou. Il effectue ses études secondaires à Nantes au lycée Georges Clemenceau, puis supérieures à Poitiers en licence en droit, et à Rennes où il obtient une licence ès lettres. Il commence une thèse sur la presse en Loire-Inférieure entre 1815 et 1848.

À 19 ans, la disparition subite de son père l’oblige à entreprendre une carrière administrative sans interrompre ses études. Il entre d’abord à la sous-préfecture de Châteaubriant. En 1939, il est nommé à la préfecture de Nantes en qualité de chef de bureau, où il sera arrêté par la Gestapo le 19 mai 1944 et déporté à Dachau.

Rapatrié fin mai 1945, Gilbert Burlot réintègre son poste avant d’être nommé fin 1945 administrateur civil au sein du Secrétariat général du Gouvernement (Direction générale de la fonction publique).

En 1955, directeur d’administration centrale, il devient directeur-adjoint de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Le directeur de l’Office étant très malade, il en assure seul la direction. Fin 1956, le général Paul Dassault, grand chancelier de l’ordre de la Légion d’honneur, envisage de lui confier poste de secrétariat général de la grande chancellerie. Mais un accident cardiaque l’oblige à abandonner son activité.

En 1959, se considérant en état de reprendre de l’activité à la Radiodiffusion-télévision française (RTF), Gilbert Burlot devient l’administrateur des journaux parlés et télévisés.

En 1963, victime d’un AVC, il interrompt toute activité professionnelle.

Il commence une thèse sur les langues slaves du sud et devient vice-président de l’Association France-Albanie.

En 1965, Gilbert Burlot revient dans sa région natale. Après avoir été longtemps adjoint au maire de la commune de La Bernerie-en-Retz, il est élu maire le 26 février 1968.

Un engagement pour sa patrie

Exempté du service militaire pour raisons de santé en 1937, Gilbert Burlot fait une demande d’engagement volontaire en septembre 1939, alors que la France et le Royaume-Uni viennent de déclarer la guerre à l’Allemagne. Mais sa demande est refusée. Dès 1940, il entre en contact avec des résistants : Max Veper, tué à Nantes en 1944, un réseau d’anciens combattants de 14-18 décimé en octobre 1941 et Pierre Arnaud, sous-préfet de Châteaubriant.

En octobre 1942, il crée un sous-réseau de renseignement d’Éleuthère (pseudonyme : Barclay) à la préfecture alors dirigée par Édouard Bonnefoy, à la mairie de Nantes ainsi que dans des administrations nantaises. Le sous-réseau rayonne également sur des communes du département. Il développe une organisation délivrant de faux papiers pour des agents du réseau, réfractaires, prisonniers, parachutistes, persécutés raciaux… Parallèlement, il assure le même type d’organisation pour l’Armée Secrète, en lien avec le mouvement de résistance Libération-Nord. Au total, 90 personnes sont enrôlées dans le sous-réseau d’Éleuthère, Libé-Nord et l’Armée secrète grâce à Gilbert Burlot. Dans ce cadre, il est en liaison avec les capitaines Monin et Ligonday.

Il détourne également des cartes d’identité, de travail, d’alimentation et des cachets dont il peut disposer à la Préfecture, aidé de personnes travaillant dans des organismes sous contrôle ennemi (Organisation Todt…). Il établit plus de 500 fausses cartes d’identité.

Il dirige la lutte contre la « relève » et le Service du travail obligatoire (STO) : collectes pour les réfractaires, acheminement de ceux-ci vers de caches et le maquis, neutralisation des opérations germano-miliciennes en liaison en particulier avec Clovis Constant de Libération-Nord, membre du Comité départemental de libération clandestin. En juin 1943, il entre en relation, grâce à Célestin Surzur, avec trois membres du réseau CND-Castille qui souhaitent rejoindre les Forces Françaises Libres en Afrique : Georges Noury, Victor Pigneux et Yves Lelchat. Avec ses amis Louis Heyte (réseau Cohors-Asturies) et Venisse (réseau Gilbert), il participe au retour vers l’Angleterre d’aviateurs.

Gilbert Burlot centralise des renseignements militaires, relevant lui-même l’implantation des défenses côtières et des fortifications intérieures (notamment à Nantes). Il dérobe les plans détaillés d’établissements contribuant à l’effort de guerre allemand (usines des Batignolles à Nantes, chantiers navals à Nantes et Saint-Nazaire, Société nationale aéronautique à Bouguenais, usine Kulhmann à Paimboeuf, usines électriques et de gaz, raffinerie de Donges et dépôts de pétrole…), indispensables à la conduite des opérations aériennes alliées. Il s’empare également de documents relatifs au plan de protection départemental et aux itinéraires allemands en cas d’évacuation de la zone côtière interdite et des circulaires confidentielles de Vichy.

Il relève des terrains de parachutages, transporte et met en place des dépôts d’armes de l’Armée Secrètes (Libé-Nord) dans le département. Il signale le déplacement des Allemands et participe à l’organisation de la Libération en cas de débarquement allié.

Il dérobe avec François Vitel et Célestin Surzur à la Standard française des pétroles une ronéo afin d’imprimer le journal clandestin La Lanterne, dont il fut avec Guy Baron (tué lors du bombardement du 23 septembre 1943) un des créateurs. Il tient de multiples réunions à son domicile pour la Résistance.

Gilbert Burlot échappe aux arrestations de septembre 1943 et janvier 1944 mais doit remettre sur pied son sous-réseau. Mis en relation avec le réseau Défense de la France auquel il a rendu des services, il est désigné pour remplacer Henri Maurice, chef du département, en cas de capture de celui-ci. Ce dernier est arrêté trois semaines plus tard, avec des documents provenant de la préfecture, transmis par Willy Pelletier, ce qui entraine son arrestation.

Arrêté par le Sicherheitdienst de Nantes (Dr Ruppert et SS Heimann) le 19 mai 1944, torturé, Gilbert Burlot ne révèle rien. Il est condamné à la déportation.

Il quitte la prison Lafayette de Nantes le 8 juin pour le camp de Compiègne. Le 17 juin, il quitte ce camp par le convoi n°1229 pour Dachau. Il est enfermé pendant trois jours dans un wagon avec 115 déportés, dont Clément Quentin, sous une température dépassant 30 degrés. S’y trouvent également des camarades de la Résistance nantaise comme Jean-Baptiste Daviais et Libertaire Rutigliano qui mourront en déportation.

Arrivé à Dachau, après une période de quarantaine, Gilbert Burlot est envoyé au commando de Landsberg am Lech à environ 80 kilomètres de Dachau.

Il participe à la résistance du camp. Il a comme camarade les Nantais Gabriel Goudy (futur député) et Jacques Choimet, ainsi que Georges Charpak (prix Nobel de physique en 1992).

Fin avril 1945, le commandant du camp Willy Wagner décide de renvoyer les déportés à Dachau. Gilbert Burlot quitte Landsberg pour le commando Kaufering, où il expérimente les conditions épouvantables infligées aux Juifs. De là, il marche pendant trois jours jusqu’à la commune Allach, située à 10 kilomètres de Dachau. Le 30 avril 1945, il est libéré par les Américains mais subit une quarantaine en raison des risques d’épidémies. Il est rapatrié en France le 1er juin 1945.

Gilbert Burlot participe à l’Amicale des anciens de Dachau, présidée par Edmond Michelet. Il en devient vice-président et rédacteur en chef du bulletin jusqu’en 1965, puis vice-président honoraire jusqu’à sa mort. Par l’Amicale, il se lie d’amitié, en particulier, avec Georges Fully, médecin-inspecteur général de l’administration pénitentiaire, assassiné à Paris en 1973.

Décorations et hommages à Gilbert Burlot

De son vivant, Gilbert Burlot reçoit les décorations suivantes :
• Grade de lieutenant homologué au titre des forces françaises combattantes (réseau Eleuthère, Centrale Praxitèle) et de la Résistance Intérieure Française – Mouvement Libération-Nord
• Commandeur de la Légion d’honneur
• Médaille de la Résistance
• Médaille militaire
• Croix de guerre avec étoile de vermeil et palme
• Médaille commémorative des services volontaires dans la France Libre
• Croix du combattant volontaire de la Résistance 
• Médaille commémorative de la guerre 1939-1945, barrette Libération
• Médaille des blessés

Le 4 mai 1978, le conseil municipal de La Bernerie-en-Retz donne le nom de Gilbert Burlot à une avenue de la ville. En mai 2025, il inaugure une plaque à sa mémoire dans cette même avenue.

Jacques Burlot
2025



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En savoir plus

Bibliographie

Coché Jean, Un Bataillon de l'Ombre, Presse de l'imprimerie de l'Atlantique, 1977, p. 19

Della Monta Francis, Mémorial annuaire des Français de Dachau, Paris, Les Presses de l'Imprimerie, 1987, p. 41 et 353

Fuchs Albert, Un commando de Dachau : Landsberg sur Lech, Paris, Belles Lettres, 1947

Guitteny Marc, Histoire illustrée de La Bernerie-en Retz. La mémoire des siècles, Éditions Marc Guitteny, 2001, p. 50, 180 et 187

Nord Pierre, Mes camarades sont morts, tomes 1 et 2, Paris, Éditions Librairie des Champs-Élysées, 1947

Webographie

Archives départementales de Loire-Atlantique

27 J 47 : Fonds du Comité d'Histoire de la Seconde Guerre mondiale. Notices individuelles (1946-1948)

Autres ressources archivistiques

Service Historique de la Défense (Vincennes et Caen) : GR 16 P 98027 ; AC 21 P 71989

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Dossier : la Résistance à Nantes

Tags

Résistant 2e GM

Contributeurs

Rédaction d'article :

Jacques Burlot

Anecdote :

Gabriel Goudy

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