
Bananes
Le « Hangar à bananes » est un merveilleux lieu de détente qui associe bistrots, restaurants, boîtes de nuit, art contemporain (une antenne du Fonds régional d’art contemporain) et promenade au bord de la Loire mis en valeur par Les Anneaux de Buren. C’est ainsi que le présente la promotion initiale, mais on peut y voir aussi un abcès de fixation pour les fêtards nantais : les deux perceptions coexistent. L’écho médiatique du « Hangar à bananes » a été tel lors de son ouverture en 2007 qu’il a occulté le passé bananier nantais et les origines même du hangar.

Facture à en-tête de l'entreprise Trias Frères, importateurs de fruits
Date du document : 05-08-1931
Le commerce des bananes, il est vrai, est particulièrement cyclique. Dans les années 1930, un premier essor, à partir des bananes canariennes puis guinéennes, conduit à une innovation technique essentielle avec le Kindia, premier navire frigorifique des Chargeurs réunis. Interrompu par la guerre, le trafic reprend à la fin des années 1940, pour atteindre pendant la saison 1954-1955 presque 50 000 tonnes, quasiment le triple de l’apogée d’avant-guerre : «La banane, c’est le fruit de Nantes », se remémore de ce moment précis la sociologue Élisabeth Pasquier racontant sa jeunesse. C’est pour accueillir ces bananes guinéennes que la Chambre de commerce édifie en 1950 le désormais fameux hangar, alors très moderne avec sa climatisation et surtout l’automatisation du déchargement des cargos bananiers.

Navire bananier  Le Kolenté 
Date du document : 11-03-1935
La Chambre de commerce met trois ans à se remettre de l’indépendance de la Guinée en 1958, et obtient un accord avec les producteurs guadeloupéens, rompu dès 1964 au profit de Rouen. Le commerce vivote ensuite, au gré d’accords éphémères avec la Côte-d’Ivoire, les Canaries, le Cameroun, avant que Saint-Nazaire puis Montoir ne s’emparent définitivement de ce segment d’importations et ne conduisent à l’abandon du hangar en 1975, providentiellement réutilisé à de tout autres fins trois décennies plus tard.

Le banaball, Le Voyage à Nantes
Date du document : 23-06-2012
L’éphémère commerce nantais renouait pourtant, sans le savoir, avec une tradition attestée au 16e siècle et liée à l’intensité des relations avec l’Espagne : l’importation de bananes venues des Canaries, et à vrai dire surtout d’oranges et de citrons venus du Sud de l’Espagne, obligatoirement vendus d’abord aux particuliers par les capitaines de navires, si bien qu’en 1571 une pauvre femme, Jeanne Cornouaille, peut se qualifier de « revenderesse de bananes » par les rues : très probablement la première hors d’Espagne…
Alain Croix
Extrait du Dictionnaire de Nantes
2018
(droits d'auteur réservés)
En savoir plus
Bibliographie
Agence Roulleau, « Hangar à bananes », dans Plus d'architecture pour plus d'humanité, Éditions PC, Paris, 2010, p. 134-143
Bovar André, Caveant Consules : mémoire de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Nantes, Nantes, 1987
Webographie
Nantes, la métamorphose d'une ville - Auran/Ina : Nantes redevient port bananier
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Rédaction d'article :
Alain Croix
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