La plaque mystérieuse de l’ancienne capitainerie...
Apposée sur le mur extérieur de l'ancienne capitainerie du port de Nantes, cette plaque est inattendue : « Marie Louise Desmortier, décédée le 19 février 1946 à l'âge de 67 ans. » Qui est donc cette Marie Louise Desmortier ? Quelle peut être l'origine de cette plaque ?
Photographie de l’ancienne capitainerie du port de Nantes
Date du document : 2023
Qui est Marie Louise Desmortier ?
Si cette personne est nantaise, sa naissance doit se situer aux alentours de l'année 1877. Les tables décennales des Archives municipales de Nantes peuvent nous renseigner. Nous ne perdons pas de vue le fait, très habituel, que les patronymes sont souvent mal orthographiés : il faut élargir nos recherches aux Des Mortiers et autres… Nous ne trouvons pas de Desmortier. Il faut remonter à la vue 162 pour découvrir une Démortier Marie Louise.
Tables décennales de l’état civil
Date du document : 1873-1882
Elle est née le 13 juillet 1878, Nantes 1er canton, acte 280. Le registre de cette année, à la vue 49 sur 89, va confirmer que cette personne est celle que nous recherchons.
Registre des actes de naissances de Nantes de l’an 1878
Date du document : 1878
La mention marginale indique le décès le 18 février 1946. C'est ce qui figure sur notre plaque !
Plaque mortuaire de Marie Louise Desmortier
Date du document : 2023
Marie Louise est la fille de Jean-Marie Demortier, jardinier, et de Marie Gérard, blanchisseuse. Ils habitent rue des Hauts-Pavés. Ne négligeons aucun détail. Ici, nous notons le premier témoin : Adolphe Audrain, également jardinier, chemin de Carcouët.
D'où provient cette plaque ?
Une première hypothèse pour justifier la présence de cette plaque pourrait être un accident, une noyade ou autre. Plusieurs essais dans la presse en ligne n'apportent strictement rien. Il faut chercher ailleurs.
En observant la plaque, nous avons une certitude. Elle a été déplacée. En effet, il y a deux trous vides, mais tachés de rouille. Preuve qu'elle était précédemment fixée avec des vis métalliques. L'hypothèse la plus vraisemblable est qu'elle provient d'un cimetière.
Nous allons donc chercher dans les registres d'inhumations des Archives municipales de Nantes. Il faudra plusieurs essais pour comprendre que le moteur de recherche refuse le prénom Marie Louise.
En essayant simplement avec Marie, une réponse apparaît : Demortier – Marie Louise – 1946 – Miséricorde.
Nous apprenons ainsi que :
• Marie Louise était lingère,
• Qu'elle habitait 6 rue de la Haute-Forêt,
• Qu'elle est inhumée dans le caveau CP 7047 – 7048 – 7132, carré MM, rang 13, Fosse 22.
Registres des inhumations.
Date du document : 1946
Un regard vers les « Successions » des Archives départementales de Loire-Atlantique (vue 41 sur 165) nous apprend qu'elle était célibataire. Le recensement de 1936 (vue 161 sur 210), à l'adresse de la rue de la Haute-Forêt, apporte une précision intéressante : Marie Louise vit chez sa cousine Marie Audrain ! Deux remarques sur ce registre : l'adresse est le 8 et non le 6, et la date de naissance 1871 est fausse !
Recensement de 1936
Date du document : 1936
Prenons le temps de nous intéresser à cette Marie Audrain. Elle est née le 7 mai 1866. Fille de Adolphe Marie, jardinier, divorcée de Pierre Bureau. Plus intéressant : elle est décédée le 9 décembre 1946, quelques mois après Marie Louise. De là à penser qu'elles sont enterrées dans le même cimetière ! Nouvelle recherche dans le registre des inhumations du cimetière Miséricorde. Effectivement Marie Audrain est bien dans le carré MM, rang 13, fosse 22 !
Tombes « Audrain »
Date du document : 2023
À ce stade des recherches, le plus simple est d'aller sur place. La double tombe « Audrain » est facile à retrouver. La plaque de Madame Marie Louise Audrain est bien là. Elle mesure 20 centimètres sur 9 centimètres et l'entraxe est de 16,5 centimètres... Exactement les dimensions et le décor de notre plaque mystérieuse. Et à n'en pas douter, les plaques sont quasiment identiques.
Trous de fixation d’une ancienne plaque mortuaire
Date du document : 2023
Pour terminer, remarquons les deux trous (entraxe 16,5 centimètres) qui indiquent l'existence d'une ancienne plaque. Nous en concluons que la plaque mystérieuse a bien été enlevée de cet emplacement initial. Par contre, dans quelles circonstances, quand et pourquoi : aucune chance de le savoir. Elle garde une partie de son mystère !
Mise à jour du 25 mars 2024 : après vérification, il s’avère que la plaque a été retirée de l’ancienne capitainerie et qu’elle n’est pas non plus présente sur la tombe de la défunte.
Patrick Perraud
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