
Confluence de l’Erdre et de la Loire (1/2)
Les recherches actuelles laissent penser que la ville de Nantes s’est tout d’abord élevée sur la rivière de l’Erdre avant de se tourner vers la Loire. L’Erdre est une rivière tranquille essentiellement utilisée par la batellerie de commerce local et, contrairement au fleuve, ses crues sont rarement destructrices. La rivière est donc dès le Moyen Age intégrée dans la ville et son cours va être modifié à plusieurs reprises au grès des aménagements. Pour autant, la gestion d’une confluence qui pouvait être dangereuse, n’en était pas moins indispensable.
L’Erdre, une rivière polluée
Tout d’abord limitrophe de la ville, l’Erdre traverse, à partir du 13e siècle, toute la partie orientale de la cité et son marais septentrional – le marais Barbin – est rapidement absorbé par l’urbanisation en pleine expansion. La rivière est alors en partie détournée pour baigner la muraille qui entoure le quartier Saint-Nicolas au-delà duquel se constitue le faubourg de la Fosse.

Plan de Nantes
Date du document : 1757
Au 17e siècle, François-Nicolas Baudot, sieur du Buisson et d’Ambenay, compare en ces termes Loire et Erdre : « [...] il n’y a nul apparence de croire que les Romains eussent basti ou habité une ville éloignée de Loire, grosse rivière saine et salubre, très navigable et utile au commerce de tant de grosses villes qui sont situées dessus, et de tout mer grande et océane dans laquelle elle s’en va rendre et unir au bout de douze lieues, et dont elle reçoit la marée jusques à Toaré, 3 lieues plus avant en terre [...]. Il n’y a pas, dis-je, l’apparence de croire que les Romains eussent basti loin d’une telle rivière, pour bastir sur la rivière d’Ardre boueuse, restagnate, époisse, mal saine et non navigable que de batelets et de bois flottis [...] ».
Cette description d’une rivière malsaine s’explique peut-être par le fait que l’Erdre est une rivière dans laquelle de nombreuses professions jettent leurs déchets. Sur ses rives, les maisons qui ont les « pieds dans l’eau » accueillent fréquemment des ateliers de tanneurs qui rejettent leurs eaux sales dans la rivière, de même que les boucheries qui « y jettent pareillement les débris des tueries qu'ils font, en sorte que ces immondices empêchent le cours de l'eau ». En écho à ses pratiques, « la ville de Nantes, par sa situation sur les rivières de Loire et d'Erdre, qui la traversent est très intéressante. Tous les particuliers qui construisent sur les bords ou dans la ville ont la faculté d'y conduire les toucs [égouts] des latrines de leurs maisons, soit directement soit en prenant attache à ceux déjà construits, lesquels passent dans le milieu des rues, et quelques-uns à peu de distance des maisons pour se rendre à la rivière ». L’Erdre est donc un égout à ciel ouvert qui permet aux Nantais de se débarrasser des immondices.
Mais, au-delà de cette fonction répurgative, la rivière est également un lieu où les marécages ou étangs marécageux – comme l’étang Barbin – sont nombreux ce qui favorise l’installation de pêcheries ainsi que de moulins qui approvisionnent la ville en farine.
La navigation sur l’Erdre
L’Erdre est également une voie de transport pour, entre autres chose, le bois de chauffage et le charbon qui sont déchargés sur des cales ou de petits quais. Autour de ces petits lieux de déchargement, des quartiers se sont élevés : un hôpital est construit au Moyen Age pour accueillir les malades indigents. Il sera reconstruit au même emplacement en 1500 avant d’être déplacé sur une autre zone inondable – la prairie de la Madeleine – au 17e siècle.
La rivière ne semble pas avoir été navigable sur sa dernière partie : les différences de topographie ne permettaient pas aux bateaux de rejoindre la Loire à partir de la chaussée Barbin et les difficultés de navigation faisaient l’objet de procès-verbaux depuis la fin du 15e siècle. La ville de Nantes était tenue de « nettoyer » – draguer – la rivière mais, au 17e siècle, le lit de l’Erdre est exhaussé par un remblai, ce qui rend encore plus difficile la navigation et, si les gabarres de Loire peuvent déposer des denrées sur les cales de l’Erdre, il n’est pas certain que les bateliers qui fréquentent la rivière puissent rejoindre le fleuve.

Projet de nivellement de l'Erdre
Date du document : 1741
Des travaux nécessaires pour faire face aux crues
La mise en œuvre de travaux d’aménagement pour faciliter l’écoulement de l’eau de l’Erdre dans le fleuve ne semble avoir été évoquée qu’au lendemain de crues mémorables. En 1576, Pierre Voullant, commissaire et conducteur général des fortifications et réparations de Bretagne va « voir le foussé […] qui conduict depuis la ripvière d'Erdre jusques en la ripvière de Loyre » pour trouver le moyen de détourner le plus gros volume des crues par la douve qui entoure la muraille du quartier Saint-Nicolas afin « que elle ne peust porter dommaige dans la ville, soict es moulins des halles et en la rue de la Casserie, et aultres endroictz de ladite ville, comme l'on la veu estre preste à y faire ceste année ». A la suite de son inspection, il propose de creuser la douve de Saint-Nicolas « à la haulteur que la marée monte, faisant des portes et eccluses au droict de la porte de Sauvetour, pour garder la grande mer de aller en ladicte ripvière d'Erdre ». Il ne semble pas que ces préconisations aient été suivies.

Plan du quartier Saint-Nicolas
Date du document :
De nouvelles réflexions sur l’aménagement de la confluence sont à nouveau formulées après la grande crue de 1711 qui marqua les esprits pendant deux cents ans. Pour autant, les travaux ne sont pas mis en œuvre : aucune écluse, aucune porte, aucun détournement de l’eau.
Suite Confluence de l'Erdre et de la Loire (2/2)
Julie Aycard, Julien Huon
Direction du patrimoine et de l'archéologie, Ville de Nantes / Nantes Métropole ; Service du Patrimoine, Inventaire général, Région Pays de la Loire
Inventaire du patrimoine des Rives de Loire
2021
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Rédaction d'article :
Julie Aycard, Julien Huon
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